La restitution des scellés et des sommes et actifs sous main de justice ou à l’AGRASC est un aspect important de la procédure pénale française. Cet article détaille les différents aspects de ce processus, de la saisie initiale à la restitution finale, en passant par les autorités compétentes et les recours possibles.
La saisie des biens dans le cadre d’une procédure pénale
Au cours d’une procédure pénale, les enquêteurs ou le juge d’instruction peuvent être amenés à saisir divers objets ou biens, appelés « scellés ». Ces saisies peuvent concerner des biens appartenant aux personnes mises en cause ou à des tiers. Les raisons de ces saisies sont multiples :
– Biens utiles à la manifestation de la vérité
– Biens dont la peine de confiscation est prévue par le code pénal
– Biens qualifiés de nuisibles ou dangereux par la loi ou le règlement
– Biens dont la détention est illicite
Une fois saisis, ces biens sont conservés par le greffe ou par des établissements extérieurs, en fonction de leur nature, de leur dangerosité ou de leur volume.
L’Agence de Gestion et de Recouvrement des Avoirs Saisis et Confisqués (AGRASC)
L’AGRASC joue un rôle central dans la gestion des biens saisis et confisqués en France. Créée pour améliorer la gestion des avoirs criminels, cette agence a plusieurs missions importantes :
1. Centraliser et gérer les sommes saisies dans le cadre des procédures pénales en France
2. Gérer les biens qui lui sont confiés
3. S’assurer du versement du produit de la vente des biens confisqués
4. Assurer la gestion et la vente de biens saisis, y compris pour le compte d’autorités judiciaires étrangères
L’AGRASC est un établissement public administratif placé sous la double tutelle du ministre de la Justice et du ministre chargé du Budget. Elle est dirigée par un magistrat de l’ordre judiciaire et composée d’agents provenant des ministères de la Justice, de l’Intérieur et du Budget.
Les autorités compétentes pour la restitution des scellés
La compétence des autorités pour prononcer la restitution des scellés dépend du stade de la procédure pénale au moment où la demande est formulée. Voici les différentes autorités compétentes :
1. Le Procureur de la République :
– Pendant l’enquête de flagrance ou l’enquête préliminaire, en l’absence de saisine d’un juge d’instruction ou d’une juridiction de jugement
– Si la procédure pénale a fait l’objet d’un classement sans suite
– Si l’instruction s’est clôturée par une ordonnance de non-lieu
– Si la juridiction de jugement saisie ne s’est pas prononcée sur la demande de restitution
2. Le Procureur Général :
– Si la juridiction de jugement saisie (Cour d’assises ou Cour d’appel) ne s’est pas prononcée sur la demande de restitution
3. Le Juge d’instruction :
– Au cours de l’instruction jusqu’à l’ordonnance de règlement
4. La Juridiction de jugement :
– Le Tribunal de police, le Tribunal correctionnel, le Tribunal pour enfants, la Cour d’assises ou la Cour d’appel peuvent statuer sur la demande de restitution
La procédure de demande de restitution
Pour obtenir la restitution des scellés, le propriétaire du bien saisi ou son avocat doit suivre une procédure spécifique :
1. Formulation de la demande :
La demande doit être formulée par voie de requête auprès de l’autorité compétente.
2. Délais :
Les délais pour formuler une demande de restitution sont prévus par l’article 41-4 du Code de procédure pénale. Si la restitution n’a pas été demandée ou décidée dans un délai de 6 mois à compter de la décision de classement ou de la décision par laquelle la dernière juridiction saisie a épuisé sa compétence, le(s) bien(s) non restitué(s) deviendra(ont) propriété de l’État, sous réserve des droits des tiers.
3. Restitution effective :
Une fois la restitution accordée, le bénéficiaire est convoqué par le greffe ou le parquet pour procéder à la restitution effective des biens. La restitution se fait sur justification d’identité et production de la décision de restitution. L’avocat du propriétaire ou tout mandataire muni d’une procuration peut également effectuer cette démarche.
4. Cas particulier des numéraires :
Lorsqu’il s’agit de numéraires transférés à l’AGRASC, la restitution est directement effectuée par cette agence, par virement.
Les motifs de refus de restitution
Il existe plusieurs situations dans lesquelles la restitution des scellés peut être refusée :
1. Le scellé est utile à la manifestation de la vérité
2. Un élément de preuve doit être conservé pendant la phase d’instruction ou de jugement
3. La restitution est de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens
4. Le bien saisi est l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction
5. La destruction des objets placés sous main de justice est prévue par une disposition particulière[1][2]
Les recours en cas de refus de restitution
En cas de refus de restitution, le demandeur dispose de voies de recours :
1. Délais pour exercer un recours :
– Si le juge d’instruction n’a pas statué dans un délai d’un mois
– Si le Procureur de la République ou le Procureur Général n’a pas statué dans un délai de 2 mois à compter de leur saisine
2. Autorité compétente pour le recours :
Le recours doit être exercé devant la Chambre de l’instruction.
3. Procédure de recours :
– Le recours doit être fait dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision du procureur de la République ou du procureur général, par déclaration au greffe du tribunal ou de la cour ou par lettre
– Dans le cas d’une décision du juge d’instruction, le délai est de dix jours à compter de la notification de la décision.
4. Effet suspensif :
Le recours est suspensif, ce qui signifie que les scellés ne sont pas détruits ou vendus si un recours est exercé.
Le rôle de l’AGRASC dans la gestion et la restitution des biens
L’AGRASC joue un rôle crucial dans la gestion et la restitution des biens saisis et confisqués :
1. Gestion des biens :
L’AGRASC est chargée de la gestion de tous les biens, quelle que soit leur nature, saisis, confisqués ou faisant l’objet d’une mesure conservatoire au cours d’une procédure pénale, qui lui sont confiés et qui nécessitent des actes d’administration pour leur conservation ou leur valorisation.
2. Exécution de la peine de confiscation :
L’AGRASC est chargée de l’exécution de la peine de confiscation au nom du procureur de la République.
3. Assistance aux juridictions :
L’AGRASC a été conçue comme une structure d’assistance juridique et pratique aux juridictions et comme un prestataire de services.
4. Facilitation des saisies :
La création de l’AGRASC a facilité la possibilité pour les magistrats de saisir des éléments du patrimoine des délinquants afin de pouvoir ensuite les confisquer et les revendre ou s’en servir pour l’indemnisation.
5. Information des créanciers et des victimes :
L’AGRASC informe les créanciers publics de la restitution d’un bien non confisqué afin d’assurer le paiement de toute créance fiscale, douanière ou sociale. Elle informe également les victimes titulaires d’une créance civile d’indemnisation afin qu’elles puissent mettre en œuvre les voies d’exécution utiles avant restitution.
6. Indemnisation des victimes :
Dans certaines conditions, l’AGRASC peut elle-même indemniser les parties civiles.
L’affectation des sommes issues des ventes de biens confisqués
Les sommes d’argent issues des ventes des biens confisqués sont affectées à diverses destinations :
1. Budget général de l’État
2. Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives
3. Actions de coopération avec des pays concernés par la restitution des biens dits « mal acquis »
4. Associations de prévention du proxénétisme