+33 (0) 7 5692 5302

La DGCCRF, le name and shame et autres actions, l’avocat en droit des marques, de la distribution et de la concurrence à Paris répond

 
 
 

Le décret « name and shame » permet à la DGCCRF de publier ses décisions.

 

Au sein du ministère chargé de l’Economie, la DGCCRF veille au bon fonctionnement des marchés, au bénéfice des consommateurs et des entreprises. La DGCCRF agit en faveur du respect des règles de la concurrence, de la protection économique des consommateurs, de la sécurité et de la conformité des produits et des services. Autorité de contrôle, elle intervient sur tous les champs de la consommation (produits alimentaires et non-alimentaires, services) ; à tous les stades de l’activité économique (production, transformation, importation, distribution) ; quelle que soit la forme de commerce : magasins, sites de commerce électronique ou liés à l’économie collaborative, etc.

En application du Décret n° 2022-1701 du 29 décembre 2022 définissant les modalités de publicité des mesures prises en application du livre IV du code de commerce et du livre V du code de la consommation, Les entreprises non conformes au droit de la consommation, de la concurrence et du commerce, peuvent être mises à l’index par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes)

Ce décret a pour base les articles L464-9 et s. du code de commerce et L521-2 et s. du code de la consommation.

« Name and shame » : que peut publier la DGCCRF ?

Non seulement les sanctions infligées pour non respect des délais de paiement, mais aussi celles infligées pour toutes les infractions poursuivables par la DGCCRF :

  • Infractions au droit de la consommation (information précontractuelle, droit de rétractation, garantie légale, pratiques commerciales trompeuses)
  • Infractions constitutives de pratiques restrictives de concurrence

 

La DGCCRF peut publier ces sanctions sur son site (cf. la page « sanctions ») ou par communiqué de presse, aux frais de l’entreprise sanctionnée sur supports physiques (presse papier, magasins) et internet (blogs, réseaux sociaux).

 

« Name and shame » : comment se faire dépublier ?

La DGCCRF, à la suite d’une enquête, prend une « injonction » ou propose une transaction.

Si l’injonction n’est pas suivie d’effet, elle peut faire l’objet d’une publication dont les termes ont été préalablement anoncés à l’entreprise concernée, avant le prononcé de l’injonction.

« Les modalités de la publicité sont précisées dans la mesure d’injonction. »

Il convient donc de se référer à la mesure d’injonction pour y vérifier que la publication est bien conforme aux prévisions. Un « affichage » ne peut en toute hypothèse exécer deux mois.

En cas de résistance à l’injonction, même publiée, l’autorité de la concurrence ou la juridiction civile peuvent êtres saisies par le ministre en vue de prises de décisions plus importantes.

Mais le ministre peut aussi prendre des mesures d’autorité, comme demander un déréférencement d’office du site web du vendeur mis en demeure.

Ainsi, dans l’affaire wish.com, le ministre a demandé et obtenu des moteurs le déréférencement du site (Conseil d’Etat, 27 janvier 2023, N° 459960), en application de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 (article Article L521-3-1 du code de la consommation).

 

 

Influenceur et contrat avec une marque, l’avocat en droit de la propriété intellectuelle à Paris répond

Mise à jour du 31 mai 2023 : loi influenceurs 

L’influenceur a généralement une communauté sur un ou plusieurs réseaux sociaux type instagram, facebook, tiktok..

Faites-vous accompagner par le cabinet Roquefeuil intervenant en droit des marques

Les marques peuvent le solliciter pour qu’il commente leurs produits ou leurs services.

Quand est-on en présence d’une opération à caractère publicitaire ? L’avocat en propriété intellectuelle vous répond

La pratique d’influenceur est très encadrée dès qu’elle est identifiée comme « publicitaire », c’est-à-dire quand l’influenceur et la marque ont conclu un accord, et que le poids de la marque se fait sentir.

La Cour de cassation rappelle que « le fait que ce message soit relayé par l’intervention d’un internaute à l’intention de son « réseau d’amis » ne lui faisait pas perdre son caractère publicitaire » (Cass. 1re civ., 3 juill. 2013, n° 12-22.633).

La publicité est soumise aux exigences induites par les pratiques commerciales trompeuses ou agressives des articles L. 121-1 et suivants du Code de la consommation, aux obligations d’identification prévues par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (L. n° 2004-575, 21 juin 2004, dite LCEN) et la lutte contre la publicité cachée, pour ce qui est du marché français.

Quels sont les droits en jeu à prendre en considération dans un contrat avec une marque ? L’avocat en propriété intellectuelle intervient

L’influenceur a bien entendu un droit à l’image.

Mais plus généralement il a un droit à la protection de tous les attributs de sa personnalité, tels son nom et prénom.

La marque a pour l’essentiel un droit de marque, lui permettant de capitaliser la réputation de son produit ou de son service.

D’autres prestataires ont un droit d’auteur, tel le photographe ou le producteur/réalisateur.

Ce droit leur permet de revendiquer une compensation contre l’exploitation de leurs travaux, outre la rémunération qu’ils ont pu recevoir pour l’accomplissement de leur prestation.

L’ensemble de ces droits doivent donc faire l’objet de négociation et de contrat afin d’éviter au mieux les risques de réclamation.

La loi visant à encadrer l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne est parue (L. n° 2020-1266, 19 oct. 2020).

Les règles du code du travail leur sont désormais applicables (art. L. 7124-1 et s.), obligeant ainsi les parents à demander une autorisation individuelle ou un agrément auprès de l’administration.

Ces derniers ont également l’obligation de placer une partie des revenus de leur enfant à la Caisse des dépôts et consignations jusqu’à leur majorité ou leur émancipation(art. L. 7124-9).

Dans tous les cas, une déclaration doit être faite, au-delà de certains seuils de durée ou de nombre de vidéos ou de revenus tirés de leur diffusion (L. n° 2020-1266, art. 3).

Parallèlement, les plateformes de partage de vidéos sont fortement incitées, sous l’égide de l’ARCOM, à adopter des chartes favorisant l’information des mineurs sur les conséquences de la diffusion de leur image sur leur vie privée ainsi que sur les risques psychologiques et juridiques qui en découlent (L. n° 2020-1266, art. 4 et 5).

La loi ouvre aux enfants un droit à l’oubli numérique qu’ils pourront exercer seuls sans leurs parents (L. n° 2020-1266, art. 6).

 

Quel sont les écueils à éviter lors de la rédaction et de la négociation du contrat avec la marque ? L’avocat en propriété intellectuelle à Paris vous assiste

Au début d’un partenariat, on a pas forcément toutes les cartes en mains pour négocier au mieux et au plus juste.

Il convient donc de prévoir une clause de révision du contrat plus ou moins souple, permettant à un contractant de se dégager, au moins dans telles ou telles conditions.

Il s’agit aussi d’éviter les contrats trop longs ou écrits trop petits, ou renvoyant à des conditions générales, souvent piégeux, ou peu clairs.

Or les contrats peu clairs ouvrent droit à interprétation. Ils sont donc source de discussions, le plus souvent à l’avantage du cocontractant économiquement plus fort.

Contrefaçon : comment réagir ?

Les NFT et le droit d’auteur

Travailleurs des plateformes

Les conditions générales

Le design marketing

Marketplaces et marques

Droit de la pornographie

Droit de la musique

Droit de la photographie

Loi sur les influenceurs

La proposition de loi vise à lutter contre l’escroquerie en bande organisée et met les influenceurs sous le régime du droit de la publicité commerciale (loi Evin, droit des jeux et loteries, droit des mineurs, droit des placements financiers, droit pharmaceutique, droit sur les alcools, tabac, droit alimentaire, santé, chirurgie esthétique, contrefaçons…) ; des agents spécialisés de la répréssion des fraudes (DGCCRF) surveilleront le secteur, avec des sanctions d’interdiction et de fermeture. Des sanctions pénales sont prévues, notament pour sanctionner l’usage d’images retouchées ; le métier d’agent d’influenceurs qui font l’intermédiaire avec les marques, est réglementé. Les opérateurs de plateforme et les réseaux sociaux doivent être vigilents sur leurs mécanismes de signalement (loi LCEN, règlement DSA).

(guide sur les obligations fiscales, sociales, réglementaires : https://www.economie.gouv.fr/guide-bonne-conduite-influenceurs-createurs-contenu)

 

Le droit de rétractation

En  l

 

De quoi s’agit-il, Quelle est la durée pendant laquelle il peut être exercé ?

Le droit de rétractation de l’Union Européenne dans la vente à distance au consommateur relève d’une obligation de résultat, il est de 14 jours (à compter de la livraison, ou à compter du contrat dans le cas d’une prestation de service, ou à compter du moment où il a été porté à la connaissance du consommateur). Il est prolongé de 12 mois tant qu’il n’a pas été porté à la connaissance du consommateur. Il permet d’annuler le contrat selon un régime propre.

Décompte :

Le décompte du délai de 14 jours commence le lendemain de la conclusion du contrat ou de la livraison du bien. Si ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié, il est prolongé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Sur l’information du consommateur et l’insuffisance d’un simple lien hypertexte :

 

 

Pourquoi un droit de rétractation ?

Le droit de rétractation s’applique dans les contrats conclus « à distance », impliquant une prise de commande hors établissement.

Il peut être comparé à une sorte de « cabine d’essayage ».

Ainsi, la prise de commande faite partiellement en établissement, peut avoir pour effet d’exclure le droit de rétractation, surtout si cela est convenu dans le contrat de vente conclu (CJUE 5 juillet 2012, Directive 2011/83 articles 9 et suivants, article 20, articles L221-18 et suivants du code de la consommation). Une simple visite préalable n’exclut cependant pas l’application de l’article L221-1 du code de la consommation.

 

En jouit-on de façon systématique ?

Ainsi, le droit de rétractation est exclu en ce qui concerne certains produits qui ne se prêtent pas à l’essayage : périssables rapidement, ou qui n’ont pas de prix fixe, ou qui ne sont pas essentiellement standards, ou qui sont sous scellés pour des raisons d’hygiène et de santé, ou qui se consomment ou sont estimés consommés au premier usage, logiciel en ligne, … A vérifier au cas par cas.

 

Peut-on y renoncer ?

On ne peut renoncer au droit de rétractation. Dès lors que l’on déclare exercer son droit de rétractation et que le produit est retourné, il doit être remboursé.

Les clauses de retour prévues par le vendeur qui seraient trop compliquées seront le plus souvent déclarées nulles ou abusives. Les frais de retour sont à la charge du consommateur, sauf s’il n’a pas été informé du droit de rétractation par le vendeur.

 

Et en ce qui concerne les services ?

Services (L221-25) :

En ce qui concerne les services, le professionnel commencera sa prestation après l’écoulement d’un délai de 14 jours, ou avant si le consommateur le demande (à cet effet il lui sera souvent demandé de régler à l’avance), et par conséquent le prix correspondant à la partie du service qui a été réalisé sera dû, dès que le professionnel indique avoir exécuté la prestation, ou une partie de celle-ci.

 

 

 

Textes :

Directive 2011/83 articles 9 et suivants, article 20

 

Articles L221-18 et suivants du code de la consommation

Mise à jour Avril 2022

Décret n° 2022-424 du 25 mars 2022 relatif aux obligations d’information précontractuelle et contractuelle des consommateurs et au droit de rétractation : Publics concernés : professionnels et consommateurs.Objet : informations fournies par le professionnel au consommateur préalablement à la conclusion d’un contrat selon une technique de communication à distance ou en dehors d’un établissement commercial, et modification, pour ces mêmes contrats, du modèle de formulaire de rétractation et de l’avis d’information type concernant l’exercice du droit de rétractation.

Entrée en vigueur : les dispositions du décret entrent en vigueur le 28 mai 2022 .
Notice : le décret est lié à l’exercice de transposition en droit interne de la directive 2019/2161 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et les directives 98/6/CE, 2005/29/CE et 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs.
Il précise, d’une part, les obligations d’information précontractuelle auxquelles les professionnels sont tenus à l’égard des consommateurs, en application de l’article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion de contrats à distance et hors établissement, et procède, d’autre part, à des ajustements rédactionnels prévus par la directive 2019/2161, notamment, sur la communication obligatoire au consommateur des coordonnées du professionnel.
En conséquence, sont modifiés l’annexe à l’article R. 221-1 du code de la consommation relative au modèle-type de rétractation, l’article R. 221-2 du même code qui précise les informations précontractuelles communiquées au consommateur en application des 4°, 5° et 6° de l’article L. 221-5, l’article R. 221-3 et son annexe relatifs à l’avis d’information concernant l’exercice du droit de rétractation ainsi que l’article R. 221-4 sur les informations fournies en cas d’enchères publiques.
Références : le code de la consommation, dans sa rédaction résultant de ce décret, peut être consulté sur le site Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).
 

Les clauses abusives, qu’est-ce que c’est ? comment les faires sanctionner ?

La nouvelle règlementation d’internet en préparation

Peut-on faire juger en France son fournisseur étranger

Remarques sur l’interprétation du contrat

Les conditions générales, servent-elles encore à quelque chose ?

Les clauses abusives

Se faire assister par un avocat en droit des marques, de la consommation et de la communication commerciale

 

Peut-on faire juger en France son fournisseur étranger ?

 

Le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 31 mai 2021 n°11-19-007483 illustre les questions de droit international privé confronté au droit des grands et petits litiges, qui peuvent se poser quand un entrepreneur ou un (prétendu) consommateur français décide d’attraire devant la juridiction française un entrepreneur étranger domicilié dans un Etat membre de l’Union européenne.

Voir aussi : les chambres de commerce internationales : https://roquefeuil.avocat.fr/international-arbitration-international-commercial-chambers-of-paris/

Quel est l’impact de la qualité de consommateur ?

Le consommateur français qui s’estime lésé par un défaut de conformité d’un produit qu’il a commandé à distance auprès d’un fournisseur étranger peut attraire ledit fournisseur devant la juridiction française et revendiquer l’application du droit français de la consommation.

Trois types de questions de droit international privé se posent :

Est-on réellement en présence d’un consommateur, supposé « partie faible » et méritant l’application de règles dérogatoires et protectrices ? Quelles sont les conséquences de cette qualification au plan procédural ?

Quelle est la juridiction réellement compétente territorialement et en fonction du taux de la demande ? L’appel est-il ouvert ? Une tentative de conciliation préalable est-elle nécessaire ?

Quel est le droit applicable ? A cet égard le droit de la consommation français, est-il applicable ? Dans quelle mesure ?

En l’espèce, le demandeur se présentait comme un consommateur, et formait une demande d’indemnisation de 4000 euros, ce qui lui permettait de saisir la juridiction

– par déclaration au greffe (d’avant réforme de 2020) ;

– sans constituer avocat, dans le cadre d’une procédure orale ;

– de soustraire la décision à la possibilité d’appel ; cette impossibilité d’appel doit inciter le défendeur à la plus grande vigilance devant une juridiction dont l’organe compétent, la chambre dite de « proximité » ou le juge des « contentieux de la protection », porte une attention particulière à la partie faible ;

– et l’obligeait à une conciliation préalable (d’avant réforme de 2020) ;

La récente réforme de procédure civile réplique à peu de choses près ces règles de seuil et de taux (en savoir plus : https://roquefeuil.avocat.fr/reforme-de-la-procedure-civile-le/)

La qualité de consommateur doit être vérifiée au préalable.

Cette notion est variable d’un pays à l’autre, et en droit français le critère selon lequel un consommateur ne peut être qu’une personne physique (critère qui paraît être le critère minimum commun à tous les Etats membres de l’UE et qui paraît repris à l’article L217-3, et dans l’article liminaire, du code de la consommation) semble insuffisant pour exclure les personnes morales des régimes de protection dus au consommateur : le tribunal a ainsi vérifié  que l’entreprise demandeuse avait bien une activité professionnelle et que son achat s’inscrivait bien dans cette activité.

Le droit français fait en effet référence à une notion intermédiaire, autre que celle de « consommateur », celle de « non-professionnel », qui attire aussi l’application des régimes protecteurs du droit de la consommation.

Toutefois, il peut être relevé que cette notion de “non-professionnel” est une notion française qui ne déclenche, selon les dispositions mêmes du code de la consommation, que certaines sections dudit code, et ne s’applique pas à la vente de marchandises et à la garantie de conformité telle que visée par ledit code. En effet, l’article L217-3 du code de la consommation fait référence à la seule qualité de « consommateur » et non à celle de « non-professionnel » :

« Les dispositions du présent chapitre [“obligation de conformité au contrat”] sont applicables aux relations contractuelles entre le vendeur agissant dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale et l’acheteur agissant en qualité de consommateur. »

 

Or le « consommateur » n’est pas à proprement parler un « non-professionnel ».

 

Ainsi l’article liminaire du code de la consommation distingue-t-il : « Pour l’application du présent code, on entend par : – consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ; – non-professionnel : toute personne morale qui n’agit pas à des fins professionnelles ; – professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu’elle agit au nom ou pour le compte d’un autre professionnel. »

 

Au niveau de l’Union Européenne, les DUE (Directive de l’Union Européenne) 2011-83 et 2019/771 et l’ensemble des directives reprenant la notion de consommateur (cf. par exemple directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, article 2) ne retiennent que la notion de consommateur selon laquelle le consommateur est une personne physique qui n’agit pas pour des fins professionnelles, libérales ou commerciales.

C’est cette définition qui est reprise dans l’article liminaire du code de la consommation français.

Le droit de l’Union ne connaît donc pas la notion de “non-professionnel” propre au droit français. En droit de l’Union, soit on est consommateur soit on ne l’est pas. Par conséquent la notion de « non-professionnel » est en principe inopposable à un ressortissant d’un autre Etat membre.

Par ailleurs si on peut concevoir que l’application du RUE (Règlement de l’Union Européenne) 1215/2012, article 7, permet la saisine du juge français dans les rapports entre ressortissants d’Etats membres, le RUE 593/2008, article 4, 1), a) prévoit bien l’application de la loi du lieu de résidence habituelle du vendeur, sauf le cas où un consommateur est impliqué (article 6)(auquel cas la loi du pays de résidence du consommateur serait applicable).

La question est d’intérêt car la garantie de conformité prévue à l’article L217-4 du code de la consommation ne joue qu’à l’égard des consommateurs, et prévoit une garantie de conformité plus poussée que celle prévue par le droit commun (1641 et 1642 du code civil ou convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises de 1980) :

Article L217-5 du code de la consommation :« Le bien est conforme au contrat : 1° S’il est propre à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable et, le cas échéant : – s’il correspond à la description donnée par le vendeur et possède les qualités que celui-ci a présentées à l’acheteur sous forme d’échantillon ou de modèle ; – s’il présente les qualités qu’un acheteur peut légitimement attendre eu égard aux déclarations publiques faites par le vendeur, par le producteur ou par son représentant, notamment dans la publicité ou l’étiquetage ; 2° Ou s’il présente les caractéristiques définies d’un commun accord par les parties ou est propre à tout usage spécial recherché par l’acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté. »

Article L217-8 du code de la consommation : « L’acheteur est en droit d’exiger la conformité du bien au contrat. Il ne peut cependant contester la conformité en invoquant un défaut qu’il connaissait ou ne pouvait ignorer lorsqu’il a contracté. Il en va de même lorsque le défaut a son origine dans les matériaux qu’il a lui-même fournis. »

En droit de l’Union, c’est le règlement « Rome I » 593/2008 qui s’applique aux rapports commerciaux pour déterminer la loi applicable, et qui désigne, sauf exceptions, la loi du pays du vendeur. La convention internationale de Vienne sur la vente internationale de marchandises du 11 avril 1980 peut aussi être sollicitée.

 

 

Notion de consommateur

Dans CJUE 9 mars 2023, aff. C-177/22, la Cour de justice affine la distinction entre le consommateur et le professionnel, à propos d’une vente d’un véhicule automobile conclue entre un acheteur personne physique, domicilié en Autriche, et un vendeur, personne morale de droit allemand.

Le règlement Bruxelles I bis n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en
matière civile et commerciale énonce, par ses articles 17 à 19, des règles de compétence protectrices du consommateur, qui est défini comme la personne
qui conclut un contrat « pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle ».

L’acheteur avait fait intervenir un concessionnaire automobile pour effectuer les recherches et contacter le vendeur, et ce
dernier avait rédigé un contrat mentionnant que l’acheteur était une société et qu’il s’agissait d’une opération entre professionnels, sans que ces mentions
ne soient contestées par l’acheteur. Le concessionnaire s’était à nouveau manifesté, en demandant au vendeur s’il était possible de mentionner le montant
de la TVA sur la facture déjà émise.

L’acheteur demanda la garantie du vendeur en faisant état de vices, et ce devant un juge autrichien dont la compétence fut discutée, l’acheteur invoquant sa qualité de consommateur pour fonder la saisine de son juge.

  •  « il convient de tenir compte des finalités actuelles ou futures poursuivies par la conclusion (du) contrat, indépendamment de la nature salariée ou indépendante de l’activité exercée par cette
    personne ». Une personne ayant conclu un contrat doit être qualifiée de consommateur si la conclusion de ce contrat ne relève pas de son activité professionnelle ou, en cas d’un contrat à double finalité, en partie
    professionnelle et en partie privée, si l’usage professionnel est négligeable dans le contexte de l’opération considérée dans sa globalité. La
    nature de l’activité professionnelle exercée par la personne qui invoque la qualité de consommateur n’est pas pertinente aux fins d’une telle qualification.
  • « il peut être tenu compte de l’impression créée par le comportement de cette personne dans le chef de son cocontractant, consistant notamment en une absence de réaction de la
    personne qui invoque la qualité de consommateur aux stipulations du contrat la désignant en tant qu’entrepreneuse, en la circonstance qu’elle a conclu ce
    contrat par le truchement d’un intermédiaire, exerçant des activités professionnelles dans le domaine dont relève ledit contrat, …

 

Hors droit de la consommation

En matière de contrat de fourniture de prestations intellectuelles au sein de l’Union européenne, le tribunal compétent est celui du lieu où les prestations ont été reçues (Règlement UE n°1215/2012 – Cour de cassation – Chambre commerciale 6 avril 2022 / n° 21-12.816) ; c’est le principe ; idem en ce qui concerne la livraison de biens, le RUE 593/2008, article 4, 1), a) prévoit l’application de principe de la loi du lieu de résidence habituelle du vendeur. Distinguer, donc, entre loi applicable et juridiction compétente.

Textes d’intérêt :

Ord. n° 2021-1734, 22 déc. 2021, transposant la directive 2019/2161 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 et relative à une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs : JO 23 déc. 2021, texte n° 21 (contrats du commerce électronique et contrats portant sur des contenus numériques ou sur des services numériques)
 
 l’ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021 « relative à la garantie légale de conformité pour les biens, les contenus numériques et les services numériques » qui a transposé les directives 2019/770 et 2019/771 du 20 mai 2019 relatives, respectivement, à certains aspects concernant les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques et à certains aspects concernant les contrats de vente de biens
 
 loi n° 2021-1485 du 15 novembre 2021 « visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France », (Renforcement de la lutte contre l’obsolescence programmée d’un produit, étendue à l’obsolescence logicielle )
 
 règlement européen du 20 juin 2019, dit « Platform to business » n° 2019/1150

Le RÈGLEMENT (UE) No 1215/2012 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, article 7 b) prévoit :

“Article 7 

Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite dans un autre État membre: 

1) a) en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande; 

  1. b) aux fins de l’application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande est:

— pour la vente de marchandises, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées, 

— pour la fourniture de services, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis; […]”

 

“Article 8 

Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut aussi être attraite: 1) s’il y a plusieurs défendeurs, devant la juridiction du domicile de l’un d’eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément; 2) s’il s’agit d’une demande en garantie ou d’une demande en intervention, devant la juridiction saisie de la demande originaire, à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire celui qui a été appelé hors du ressort de la juridiction compétente; 3) s’il s’agit d’une demande reconventionnelle qui dérive du contrat ou du fait sur lequel est fondée la demande originaire, devant la juridiction saisie de celle-ci; 4) en matière contractuelle, si l’action peut être jointe à une action en matière de droits réels immobiliers dirigée contre le même défendeur, devant la juridiction de l’État membre sur le territoire duquel l’immeuble est situé.

Ces dispositions permettent d’attraire le vendeur domicilié dans un autre Etat membre :

  • soit dans cet autre Etat membre
  • soit devant la juridiction du lieu de livraison ou du dommage
  • soit devant la juridiction compétente pour un autre défendeur, en cas de connexité évidente

 

Sur la qualité de maître de l’ouvrage revendiquée par un plaignant français (cas de malfaçons, de produits défectueux) : 

Le maître de l’ouvrage  – non consommateur – dispose-t-il d’une action directe contre le sous-traitant qui serait basé dans un autre Etat membre ?  C’est le droit national de cet autre Etat membre qu’il faudrait solliciter pour répondre à la question.

Le règlement de l’Union Européenne (RUE) 593/2008, article 4, 1), a) prévoit bien l’application de la loi du lieu de résidence habituelle du vendeur :

“Article 4 

Loi applicable à défaut de choix 1. À défaut de choix exercé conformément à l’article 3 et sans préjudice des articles 5 à 8, la loi applicable au contrat suivant est déterminée comme suit: a) le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle; […]

Le règlement s’applique aux contrats conclus en Union Européenne, et son article 6 “Contrats de consommation” n’exclut pas lesdits contrats de son application, mais désigne comme loi applicable la loi du pays du consommateur : Encore faut-il qu’un “contrat de consommation” existe.

En matière de vente internationale de marchandises, la convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises (ci-après “CVIM” (Convention des Nations Unies sur les contrats de Vente internationale de  marchandises du 11 avril 1980), à laquelle la France est aussi partie, peut être sollicitée.

Aucune de ses dispositions ne prévoit une action directe du maître de l’ouvrage contre le sous-traitant.

En l’absence d’une disposition spécifique de la convention,  il ne peut y être découvert un quelconque droit d’action directe du maître de l’ouvrage contre le sous-traitant, qui n’a aucun rapport contractuel avec ledit maître.

Cette convention consacre expressément le principe de relativité des contrats, condamnant en principe les actions directes en responsabilité du sous-acquéreur contre le fabricant ou le vendeur initial. 

Une telle action devrait donc, sauf exception, être refusée sur le fondement de l’article 7 de la CVIM : 

Article 7 1) Pour l’interprétation de la présente Convention, il sera tenu compte de son caractère international et de la nécessité de promouvoir l’uniformité de son application ainsi que d’assurer le respect de la bonne foi dans le commerce international. 2) Les questions concernant les matières régies par la présente Convention et qui ne sont pas expressément tranchées par elle seront réglées selon les principes généraux dont elle s’inspire ou, à défaut de ces principes, conformément à la loi applicable en vertu des règles du droit international privé.

L’action directe est communément considérée comme une exception française.

Convention de droit matériel, la CVIM est applicable dans une cinquantaine d’États qui, pour la quasi unanimité ne connaissent pas l’action contractuelle directe dans les groupes de contrats.

Cette convention ne prévoit pas l’action directe, et le principe d’unité d’application du droit international consacré à son article 7,1), ne militent pas en faveur de la reconnaissance d’une telle action.

La chambre commerciale de la Cour de cassation a pour sa part décidé que l’action directe exercée par le sous-acquéreur contre le fabricant doit être soumise à la loi désignée par la règle de conflit du for dans la mesure où cette action « relève des matières régies par la CVIM mais n’est pas expressément tranchée par elle », ni ne relève de l’un de ses principes généraux (Cass. com., 16 janv. 2019 : JDI 2019, n° 4, note E. Fohrer-Dedeurwaeder).

 

Les clauses abusives, qu’est-ce que c’est, comment les faire sanctionner ?

 

 

A l’origine : lutter contre les conditions abusives contenues dans les conditions générales standard

Les professionnels proposent le plus souvent au consommateur ou au non professionnel des conditions  standard non négociables, prérédigées, favorables aux déséquilibres, aux « abus », par exemple en matière de bail d’habitation, d’assurance, de déménagement, ou autres contrats destinés au consommateur, et quelque soit le support utilisé : bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets..

 

Des décrets listant les clauses abusives

 

Le législateur français s’est emparé de la question avec la loi n°78-23 du 10 janvier 1978 en prévoyant que le pouvoir exécutif, sur recommandation d’une Commission (étatique) des clauses abusives, pouvait désormais enrayer ce phénomène massif en décrétant quelles étaient les clauses abusives.

 

La clause abusive est celle qui créée un déséquilibre, mais ne porte pas sur la chose et le prix.

La clause abusive est celle qui, sans pouvoir toutefois porter sur l’objet même du contrat ou sur le prix (d’autres régimes s’appliquent alors), créée un « déséquilibre significatif ».

Le juge, plus tard confirmé par la loi, s’est aussi reconnu ce pouvoir, en réputant « non écrite » la clause qu’il pouvait juger abusive en application des critères légaux, en particulier sur saisine des associations de consommateurs ou de la DGCCRF.

Ce régime d’ordre public est applicable sur l’ensemble du territoire national dès lors, en principe, que le consommateur s’y trouve, y compris quand des relations internationales sont en cause.

 

Quelle sanction ?

Ces sont les pouvoirs publics et les associations de consommateurs qui s’intéressent le plus aux clauses abusives et recherchent auprès du juge (après avertissements) des injonctions de retrait et des indemnités.

Voir par exemple l’action de groupe lancée par UFC Que Choisir contre Google :

Vie privée/données personnelles – Action de groupe contre Google

Les particuliers ne sont pas privés de recours et invoqueront le caractère abusif d’une clause à l’occasion d’un litige sur un contrat. Ils peuvent solliciter l’intervention d’associations de consommateurs.

http://www.inc-conso.fr/content/les-associations-de-consommateurs

Dans tous les cas une clause reconnue abusive sera réputée « non écrite ».

 

Que faire en présence d’une clause que l’on pressent « abusive » ?

Il convient de vérifier que la clause n’est pas déjà considérée comme définitivement abusive, ou sans doute abusive, dans les listes prévues aux articles R211-1 et suivants du code de la consommation.

En effet les clauses déjà déclarées abusives ou soupçonnées d’être abusives selon ces textes ont toutes leurs chances d’être spontanément abandonnées par le vendeur ou le prestataire, ou confirmées comme abusives par le juge.

D’ailleurs,

« Le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.

 

Il écarte d’office, après avoir recueilli les observations des parties, l’application d’une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat » (Article R. 632-1 du code de la consommation)

Le juge, mais aussi les professionnels, les associations de consommateurs, les pouvoirs publics, peuvent dans tous les cas saisir pour avis la Commission des clauses abusives (Articles L882-5 et R822-21 du code de la consommation).

La collection de décisions de justice, avis et recommandations, constituée par la Commission des clauses abusives illustre les cas où une clause a été qualifiée d’abusive. Ces décisions pourront aussi servir de référence :

Accueil

 

Textes applicables :  

Articles L212-1 et suivants, L241-1 et suivants, du code de la consommation

Articles R211-1 et suivants du code de la consommation

Se faire assister par un avocat spécialisé marques et consommation

Le droit de rétractation

La nouvelle règlementation d’internet en préparation

Remarques sur l’interprétation du contrat

Les conditions générales, servent-elles encore à quelque chose ?

Peut-on faire juger en France son fournisseur étranger ?

Google Ads : complice ou concurrent ?

Mise à jour du 1er avril 2023 : Google ads complice des infractions au droit de la publicité : cliquer ici

 

Abus de position dominante – l’entrepreneur évincé de Google Ads

Tribunal de commerce de Paris, ordonnance de référé du 30 avril 2020

Majordom’, Digital Solutions Prod et autres / Google Ireland Ltd et Google France

Tribunal de commerce de Paris, ordonnance de référé du 30 avril 2020, Ordonnance de référé visant à temporiser les effets d’une exclusion d’une entreprise du service Adwords (annonces publicitaires Google Ads)

Google Ireland Limited (ci-après « Google Ireland ») est la principale filiale européenne de Google LLC, société fondée en 1998 en Californie, qui propose aux internautes un service de moteur de recherche gratuit. Les recettes de Google découlent notamment de la publicité qu’elle diffuse, en particulier via son programme « Google Ads » qui est le programme de publicité liée à la recherche de Google exploité Google, notamment en Europe par Google Ireland.

Google Ads est un service de vente d’espace publicitaire qui offre aux annonceurs la possibilité d’afficher des publicités sur le site du moteur de recherche de Google en fonction des termes de recherche qui ont été tapés par les internautes.

Google France est le gestionnaire en France des liens sponsorisés.

Dans la suite de l’ordonnance les sociétés Google Ireland et Google France seront désignées conjointement sous le nom de « Google » sauf précision spécifique.

Les demanderesses exploitent toutes un service de renseignements téléphoniques (numéros commençant par 118). Ces services, qui ont remplacé le 12, proposent au consommateur de lui fournir par téléphone les coordonnées d’un particulier ou d’un professionnel, et de le mettre en relation avec le numéro recherché.

Majordom’ est fournisseur du service de renseignements téléphoniques 118 818 autorisé par l’ARCEP.
Digital Solutions Prod est fournisseur des services de renseignements téléphoniques 118 002 et 118 300 autorisés par I’ARCEP.
Premium Audiotel et E-Guide Limited sont ou ont été fournisseurs du service de renseignements téléphoniques 118 609 autorisé par I’ARCEP. Leur relation contractuelle avec Google fait débat entre les parties dans le cadre de la présente instance.
Aowoa est fournisseur du service de renseignements téléphoniques 118 999 autorisé par
I’ARCEP.

Le 11 septembre 2019, Google a annoncé sa décision de modifier ses conditions générales, à savoir la règle Google Ads relative aux « Autres activités soumises à restriction», en vue de ne plus autoriser les annonces pour les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement d’appel. Cette décision devait prendre effet trois mois après, en décembre 2019.

Des discussions se sont déroulées entre les parties en septembre et octobre 2019 et Google a annoncé en décembre 2019 le report de sa mesure d’exclusion des services de renseignements téléphonique du service Google Ads en mars 2020.

C’est dans ces circonstances que les sociétés SAS Majordom’, SAS Digital Solutions Prod, SAS Premium Audiotel, Société de droit anglais E-Guide Limited, SAS Aowoa, aux termes d’une ordonnance rendue par M. le président de ce tribunal en date du 17 février 2020, l’autorisant en application des dispositions de l’article 485 du CPC à assigner en référé d’heure à heure pour l’audience du 6 mars 2020, nous demande par acte du 21 février 2020, et pour les motifs énoncés en sa requête de :

Vu l’article 873 du Code de procédure civile,
Vu l’article L. 420-2 du Code de commerce,
Vu la décision de l’Autorité de la Concurrence du 19 décembre 2019 no19-D-26,
Vu la jurisprudence citée,
Vu l’annonce Google non signée intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels (mars 2020) »
Vu les pièces versées aux débats,

Dire que l’annonce non signée, intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels (mars 2020) », publiée sur la page web https://support.Google.com/adspolicy en septembre 2019 et modifiée en décembre 2019, et annonçant l’exclusion sans date précise et selon des modalités non claires, des Sociétés de services de renseignements téléphoniques réglementés en France, du service Google Ads (anciennement « Google Adwords »), constitue un trouble manifestement illicite causant un dommage imminent aux Sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa au sens de l’article 873 du Code de Procédure Civile,

En conséquence, en l’état de l’annonce Google intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels (mars 2020) »et à titre conservatoire :
Ordonner, sous astreinte de 100.000 euros par jour de retard, aux sociétés Google France et Google Ireland Limited, le report de la mesure annoncée, publiée en septembre 2019 et modifiée en décembre 2019, intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels (mars 2020)», pour les Sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa, pour un délai de six (6) mois à compter de l’Ordonnance à intervenir, nonobstant l’application par Google France et Google Ireland Limited de son actuel contrat avec les Sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa, durant ce temps.

En tout état de cause :
Condamner in solidum les sociétés Google France et Google Ireland Limited au paiement de la somme de 7.000 euros respectivement aux sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

A l’audience du 6 mars 2020, nous avons remis la cause au 3 avril 2020 pour conclusions en réplique du demandeur.

L’audience du 3 avril 2020 a été annulée en raison la pandémie de COVID-19.

En application de l’article 7 de l’ordonnance no2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, les parties ont été invitées à comparaître devant Monsieur Laurent Levesque, président, à l’audience du 22 avril 2020 à 11h, qui s’est tenue en visioconférence via la plateforme Tixeo. Un procès-verbal des opérations effectuées est dressé par le greffier.

Ce jour, les conseils des sociétés Google Ireland Limited et Google France déposent des conclusions motivées aux termes desquelles ils nous demandent de :

Vu les Conditions Générales Google Ads applicables aux annonceurs situés au Royaume Uni,
Se déclarer incompétent au profit des juridictions anglaises s’agissant des demandes de la société E-Guide.

Vu les articles 122, 31 et 32 du Code de procédure civile,
Prononcer la mise hors de cause de Google France ;
Juger que les demandes des sociétés E-Guide et Premium Audiotel sont irrecevables.

Vu l’article 873 du Code de procédure civile,
Débouter les sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, E-Guide, Premium Audiotel et
Aowoa de l’intégralité de leurs demandes.

En tout état de cause,

Condamner chacune des sociétés Majordom’, Digital Solutions Prad, E-Guide, Premium
Audiotel et Aowoa à verser aux sociétés Google lreland et Google France la somme de
10.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner les sociétés Majordom’, Digital Solutions Prad, E-Guide, Premium Audiotel et
Aowoa aux entiers dépens.

Les conseils des sociétés SAS Majordom’, SAS Digital Solutions Prod, SAS Premium Audiotel, Société de droit anglais E-Guide Limited, SAS Aowoa déposent des conclusions motivées aux termes desquelles ils nous demandent, dans le dernier état de leurs prétentions, de :

Vu l’article 873 du Code de procédure civile,
Vu l’article L. 420-2 du Code de commerce,
Vu la décision de l’Autorité de la Concurrence du 19 décembre 2019 no19-D-26,
Vu la jurisprudence citée,
Vu l’annonce Google non signée intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels (mars 2020) »
Vu les pièces versées aux débats,

– Se déclarer compétent pour juger la présente affaire,
– Dire que les demandes des sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod  , Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa sont parfaitement recevables,
– Dire que la société Google France ne peut être mise hors de cause dans le cadre de la présente affaire,
– Dire que l’annonce non signée, intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels (mars 2020} »,
publiée sur la page web https://support.Google.com/adspolicy en septembre 2019 et modifiée en décembre 2019, et annonçant l’exclusion sans date précise et selon des modalités non claires, des Sociétés de services de renseignements téléphoniques règlementés en France, du service Google Ads (anciennement « Google Adwords »), constitue un trouble manifestement illicite causant un dommage imminent aux Sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa au sens de l’article 873 du Code de Procédure Civile,
– Constater que les sociétés Google France et Google Ireland Limited ont refusé de publier, depuis la nuit du 30 mars au 31 mars 2020, toutes les annonces des sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa en dépit de la présente instance et de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le Gouvernement Français en raison du Covid 19,

En conséquence en l’état de l’annonce Google intitulée « Nouveau règlement sur les services de renseignements téléphoniques, de transfert et d’enregistrement des appels
(mars 2020} » mise en application dans la nuit du 30 au 31 Mars 2020, et à titre conservatoire:

– Ordonner sous astreinte de 100.000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la décision à intervenir, aux sociétés Google France et Google Ireland Limited, le rétablissement de la publication et de la diffusion des annonces en lien avec le service réglementé des renseignements téléphoniques, des comptes Google Ads des sociétés Majordom’, Dgital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa telles qu’elles étaient diffusées avant la mesure d’exclusion appliquée par les défenderesses dans la nuit du 30 au 31 Mars 2020.
– Dire que cette mesure de rétablissement intervient dans le cadre du contrat ayant lié ou liant chacune des parties avec Google au titre du service Google Ads et que les parties restent soumises au respect de ses dispositions.
– Donner acte que le rétablissement ainsi ordonné, s’applique dans l’attente d’une décision au fond du Tribunal de Céans statuant sur la validité de la mesure d’exclusion
contestée, étant entendu que les sociétés Majordom’, Digital Solutions Pord, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa s’engagent à assigner au fond les sociétés Google France et Google Ireland Limited dans un délai de (2) deux mois à compter de l’Ordonnance à intervenir.

En tout état de cause :
– Débouter les sociétés Google France et Google Ireland Limited de la totalité de leurs demandes, fins et prétentions,
– Condamner in solidum les sociétés Google France et Google Ireland Limited au paiement de la somme de 7.000 euros respectivement aux sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, Premium Audiotel, E-Guide Limited et Aowoa au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications et observations, nous avons remis le prononcé de notre ordonnance, par mise à disposition au greffe, le jeudi 30 avril 2020 à 16h.

 

DISCUSSION

Sur la compétence territoriale relative à E-Guide ltd

L’exception d’incompétence ayant été soulevée avant toute défense au fond ou fin de non­recevoir, nous la dirons recevable.

Google, demanderesse à l’exception, soutient qu’E-Guide ltd, ayant son siège social au
Royaume Uni, a accepté les conditions générales applicables aux annonceurs britanniques qui prévoient une clause attributive de compétence au profit des tribunaux anglais

Les demanderesses, défenderesses à l’exception, versent aux débats la décision de I’ARCEP ayant transféré de E-Guide ltd à Premium Audiotel le numéro 118 609. Elles soutiennent que, du fait de ce transfert, E-Guide ltd est devenue l’agent de publicité de Premium Audiotel et a donc accepté de se soumettre aux conditions générales de
Google France qui prévoient la compétence du tribunal de commerce de Paris en cas de litige;

Nous relevons que les demanderesses ne procèdent toutefois que par affirmations et ne
versent aux débats aucun élément probant au soutien de leurs allégations relatives à
l’existence d’un mandat d’agent de publicité.

Nous retenons qu’E-Guide ltd échoue à démontrer la compétence du tribunal de céans.

En conséquence, nous renverrons les parties à mieux se pourvoir, s’agissant des demandes
d’E-Guide ltd.

Sur la demande de mise hors de cause de Google France

Nous relevons que la SARL Google France, seule société à intervenir légalement en
France et à développer l’activité du groupe Google sur le territoire national, est présentée aux yeux du public français comme étant le gestionnaire des liens sponsorisés et qu’elle se comporte comme responsable sur le territoire français de l’activité publicitaire du site Internet Google France ;

Nous débouterons en conséquence les défenderesses de leur demande mise hors de cause
de Google France.

Sur les demandes visant l’irrecevabilité des demandes de E-Guide ltd et Premium Audiotel

Nous rappelons que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ; que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention ; qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

> Sur l’absence d’intérêt à agir d’E-Guide ltd
Nous rappelons que nous nous sommes ci-dessus déclaré incompétent au profit des juridictions anglaises s’agissant des demandes d’E-Guide ltd.
Nous dirons en conséquence n’y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir visant cette société.

> Sur l’absence de qualité à agir de Premium Audiotel
Nous relevons que le compte Google Ads dePremium Audiotel a été définitivement suspendu le 2 mai 2018 pour non-paiement de ses factures, et que le tribunal de céans a rejeté le 26 novembre 2018 l’intégralité des demandes d’indemnisation que Premium Audiotel avait formées contre Google Ireland au titre de prétendus manquements contractuels (pièce Google n°18).

Nous retenons que, comme nous l’avons déjà relevé supra, Premium Audiotel ne verse aux débats aucun élément probant au soutien de ses allégations relatives au fait qu’elle serait un annonceur représentée par E-Guide ltd en qualité d’agent de publicité ; que Premium Audiotel n’a donc plus aucune relation contractuelle avec Google Ireland depuis mai 2018 ; qu’elle n’a pas qualité pour demander en référé que les conditions contractuelles actuellement en vigueur soient modifiées en ce qui la concerne, et que l’application de la règle sur les services de renseignements téléphoniques soit suspendue à son bénéfice pour six mois.
Nous dirons donc Premium Audiotel irrecevable pour défaut de qualité à agir.

Sur la demande de rétablissement sous astreinte de la publication et de la diffusion des annonces en ligne avec les services réglementés des renseignements téléphoniques des demanderesses

Nous rappelons que nous pouvons, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

S’agissant du trouble manifestement illicite, nous rappelons que celui-ci s’entend de toute
perturbation résultant d’un fait qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente d’une règle de droit (y compris la violation évidente d’une stipulation contractuelle).

Les demanderesses au soutien de leurs allégations relatives à l’existence d’un trouble
manifestement illicite exposent que :
– L’annonce de Google est imprécise, opaque et discriminatoire,
– Google détient sur le marché de la publicité en ligne liée aux recherches une position dominante,
– Google se rend coupable, à l’encontre des demanderesses, de refus de vente,

Les défenderesses répliquent que le trouble manifestement illicite n’est pas démontré :
– Les demanderesses ne démontrent pas le comportement abusif de Google dès lors que la nouvelle règle est claire et précise, n’est pas discriminatoire et ne constitue pas un refus de vente au sens de la jurisprudence de la CJUE.
– Elles de démontrent pas non plus l’existence d’une restriction sensible de concurrence sur le marché en cause.

Nous relevons que, selon les dires mêmes de Google, l’un des opérateurs de renseignements téléphoniques dont le compte Google Ads avait été suspendu, la société Amadeus, a saisi l’Autorité de la concurrence en mai 2018 d’une plainte et d’une demande de mesures conservatoires au motif que Google aurait abusé de sa position en suspendant son compte Google Ads et en refusant certaines de ses annonces.

Par décision du 31 janvier 2019, l’Autorité de la concurrence statuant sur la demande de
mesures conservatoires d’Amadeus a considéré à titre provisoire qu’en l’état des éléments produits au débat, les pratiques de Google à l’égard d’Amadeus étaient susceptibles de constituer un abus de position dominante parce qu’elles étaient susceptibles (i) de caractériser une rupture brutale des relations commerciales avec cette société dans des conditions qui n’étaient pas objectives et transparentes et (ii) d’être regardées comme discriminatoires par rapport à d’autres fournisseurs de services payants de renseignements téléphoniques en 118. Elle a en conséquence ordonné un certain nombre de mesures conservatoires à l’encontre de Google dans l’attente de l’issue de l’instruction au fond, et lui a notamment demandé de clarifier les règles Google Ads applicables aux services payants de renseignements par voie électronique.

Google soutient :
– qu’elle a mis en œuvre les mesures conservatoires ordonnées par l’Autorité de la concurrence et a soumis à celle-ci un rapport détaillant les actions qu’elle a entreprises en exécution de chacune des mesures conservatoires,
– qu’elle a informé l’Autorité de la concurrence de cette décision avant de la mettre en œuvre, lors d’une conférence téléphonique qui s’est tenue le 4 septembre 2019 et qui a été suivie d’un email,
– que le rapporteur à l’Autorité de la concurrence a accusé réception de cet email et n’a formulé aucune objection.

Nous relevons toutefois que l’Autorité de la Concurrence s’est simplement contentée d’adresser un courriel d’accusé réception à Google (pièce Google N°24), rédigé dans les termes suivants, qui ne constituent pas une approbation formelle de la mesure d’exclusion des services de renseignements téléphoniques du service Google Ad :
« Maitres,
Nous accusons réception de votre courrier électronique.
Bien cordialement. »

Nous retenons que les demanderesses démontrent ainsi l’existence d’un trouble manifestement illicite.

S’agissant du dommage imminent, nous rappelons que la question de l’imminence d’un
dommage est à notre appréciation et s’apprécie au moment où nous statuons, avec l’évidence qui s’impose à nous – le dommage imminent étant celui qui n’est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer.

Nous relevons que l’Autorité de la Concurrence, dans sa décision no19-D-26 du 19 décembre 2019, a souligné dans les termes suivants la dépendance des sociétés de services et renseignements téléphoniques au trafic généré par les annonces Google Ads :

« § 461 : Une proportion significative des sites non adossés à des grands groupes a en effet recouru de façon intensive au référencement payant dans les trois secteurs concernés par l’étude économique sur la période 2004-2018. Ainsi, près d’un tiers des sites non adossés à des grands groupes dans les secteurs de l’information sur les entreprises a eu plus de [80 – 90] % de clics payants parmi les clics reçus de Google. Dans le secteur des annuaires, [Ndr : comprenant, aux termes de l’article 34 du code des postes et des communications électroniques, les services de renseignements téléphoniques] huit des vingt premiers sites non adossés à des grands groupes ont eu plus de [80 – 90] % de clics payants parmi les clics reçus de Google, et plus de la moitié des vingt premiers sites ont eu la moitié ou plus de clics payants parmi les clics en provenance de Google. (…)

Il a été constaté que les suspensions ou fermetures de comptes Google Ads résultant de l’application par Google de ses Règles litigieuses se sont traduites par des diminutions très substantielles des trafics et des chiffres d’affaires des sites internet concernés, contrastant avec les croissances affichés par ces sites lorsqu’ils avaient accès à Google Ads. »
Les demanderesses versent aux débats des attestations de leurs dirigeants, établies conformément aux prescriptions légales, précisant que :
« Sur les exercices 2018 et 2019, le chiffre d’affaire de la société Majordom’ généré grâce au service Google Ads était de 88%,

sur les exercices 2017, 2018 et 2019, le chiffre d’affaires de la société Digital Solutions
PROD généré grâce au service Google Ad était de 95%, ( …)

sur l’exercice 2019, le poste auprès du service Google Ads et le service de renseignements téléphoniques représentait 96,42% du chiffres d’affaires de la société Aowoa. ».

Google soutient enfin, et surabondamment, que les demanderesses ont elles-mêmes créé
leur propre urgence en attendant pour assigner devant nous en référé d’heure à heure plus de cinq mois après l’annonce de la nouvelle règle sur les services de renseignements téléphoniques, ce qui démontrerait en soi l’absence de toute urgence.

Nous relevons toutefois que, dès l’annonce en septembre 2019 par Google de sa décision
d’exclure les services de renseignements téléphonique du service Google Ads en décembre 2019, les demanderesses ont demandé des explications à Google ; que celle-ci a annoncé en décembre 2019 le report de sa mesure d’exclusion des services de renseignements téléphonique du service Google Ads en mars 2020 ; que les demanderesses ont assigné les défenderesses d’heure à heure devant nous dès le 20 février 2020; que l’instance est venue à notre audience du 6 mars 2020, alors que les demanderesses n’avaient reçu, ce qui n’est pas contesté par Google, les conclusions des défenderesses que la nuit précédente ; que nous avons renvoyé l’affaire à notre audience du 3 avril 2020 ; qu’il n’est pas contesté que Google a cessé de publier, depuis la nuit du 30 mars au 31 mars 2020, toutes les annonces des demanderesses ; que notre audience du 3 avril 2020 n’a pu se tenir à cause de l’état d’urgence sanitaire déclaré par le Gouvernement français en raison du Covid 19 ; que les demanderesses se sont rapprochées du greffe du tribunal dès le 1er avril 2020 et ont demandé à celui-ci de leur faire part de toute information utile, notamment en ce qui concerne la reprise des audiences, ou le fait que leur procédure de référé d·heure à heure puisse être traitée de façon prioritaire.

Nous retenons que les demanderesses n’ont pas fait preuve dans la mise en œuvre de leur
demande de procédure conservatoire d’une négligence dans la défense de leurs intérêts susceptible de démontrer l’inutilité des mesures qu’il nous est demandé d’ordonner.

Nous retenons que la décision de l’Autorité de la concurrence et les attestations des
demanderesses permettent d’établir l’existence d’un dommage imminent, et que les défenderesses échouent à démontrer que les demanderesses aient, par négligence, créé leur propre urgence.

Nous ordonnerons en conséquence aux défenderesses, sous astreinte in solidum de 100.000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la présente décision, pour une durée d’un mois à l’issue de laquelle il pourra de nouveau être fait droit, le rétablissement de la publication et de la diffusion des annonces en lien avec le service réglementé des renseignements téléphoniques, des comptes Google Ads des sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod et Aowoa telles qu’elles étaient diffusées avant la mesure d’exclusion appliquée par les défenderesses dans la nuit du 30 au 31 Mars 2020.

Nous dirons que cette mesure de rétablissement intervient dans le cadre du contrat ayant lié ou liant chacune des parties avec Google au titre du service Google Ads et que les parties restent soumises au respect de ses dispositions.

Nous donnerons acte aux demanderesses que le rétablissement ainsi ordonné, s’applique
dans l’attente d’une décision au fond du tribunal de céans statuant sur la validité de la mesure d’exclusion contestée, et que les sociétés Majordom’, Digital Solutions Prod, et Aowoa s’engagent à assigner au fond les sociétés Google France et Google Ireland Limited dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision.

Nous dirons que faute pour les demanderesses de respecter cet engagement, les
défenderesses pourront reprendre la mise en œuvre de la mesure de cessation de publication des annonces des demanderesses dès l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision.

Sur l’article 700 du CPC et les dépens

Il parait équitable, compte tenu des éléments fournis, d’allouer aux demanderesses une
somme de 7.000 €, en application de l’article 700 du CPC, les déboutant pour le surplus, et de condamner les défenderesses in solidum aux dépens.

 

DECISION

Statuant par ordonnance contradictoire en premier ressort,

Sur l’exception d’incompétence,
Vu l’article 81 du CPC

Disons les défenderesses recevables en leur exception d’incompétence,

Renvoyons les parties à mieux se pourvoir, s’agissant des demandes d’E-Guide ltd ;

Disons n’y avoir lieu à statuer sur la fin de non-recevoir pour défaut d’intérêt à agir visant cette société ;

Déclarons Premium Audiotel irrecevable pour défaut de qualité à agir ;

Vu l’article 873 du CPC,

Déboutons les défenderesses de leur demande mise hors de cause de Google France ;

Ordonnons à Google Ireland Limited et Google France, sous astreinte in solidum de 100.000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la présente décision, pour une durée d’un mois à l’issue de laquelle il pourra de nouveau être fait droit, le rétablissement de la publication et de la diffusion des annonces en lien avec le service réglementé des renseignements téléphoniques, des comptes Google Ads des sociétés Majordom’, Digital Solution Prod et Aowoa telles qu’elles étaient diffusées avant la mesure d’exclusion appliquée par les défenderesses dans la nuit du 30 au 31 Mars 2020 ;

Disons que cette mesure de rétablissement intervient dans le cadre du contrat ayant lié ou liant chacune des parties avec Google au titre du service Google Ads et que les parties restent soumises au respect de ses dispositions ;

Donnons acte à Majordom’, Digital Solutions Prod, et Aowoa que le rétablissement ainsi ordonné, s’applique dans l’attente d’une décision au fond du tribunal de céans statuant sur la validité de la mesure d’exclusion contestée, et qu’elles s’engagent à assigner au fond les sociétés Google Ireland Limited et Google France dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision ;

Disons que, faute pour Majordom’, Digital Solutions Prod, et Aowoa de
respecter cet engagement, Google Ireland Limited et Google France pourront reprendre la mise en œuvre de la mesure de cessation de publication des annonces des demanderesses dès l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision ;

Rejetons les demandes des parties autres, plus amples ou contraires ;

Condamnons les Google Ireland Limited et Google France à payer in solidum aux demanderesses la somme de 7.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC ;

Condamnons in solidum Google Ireland Limited et Google France aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 200,12 € TTC dont 33,14 € de TVA ;

La présente décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l’article 489 du CPC.

Se faire assister par un avocat spécialisé marques, concurrence

Le service Google Ads peut-il à l’inverse favoriser la commission d’infraction en permettant l’achat de mots clés soutenant une activité illicite ?

La Cour d’appel de Paris – Pôle 5 – Chambre 1 dans son arrêt du 29 mars 2023 / n° 21/00704, condamne Google Ireland et Google France solidairement à indemniser le syndicat des producteurs de spectacles (Prodis) pour avoir permis l’achat de mots clés soutenant l’activité de vente illicite de billets de spectacles. En effet, l’article 313-6-2 du code pénal prohibe la vente de billets de spectacle, réalisée de manière habituelle, et sans l’autorisation du producteur ou de l’organisateur de spectacle.

Google Ads exerce déjà sa police sur les annonceurs, et multiplie les chartes en la matière, à l’adresse de divers secteurs d’activité : finance, jeux, porno, etc..

La jurisprudence pourraît inciter Google a un contrôle encore plus accru en France.

Bien que l’information ne soit pas encore disponible, il est probable que la Cour de cassation soit à son tour amenée
à se pencher sur cette affaire. Et son intervention sera d’autant plus attendue que l’impact de cette décision peut

L’article 313-6-2 du code pénal connaît d’autres applications, notamment dans le domaine sportif.

C’est dans le cadre de l’affaire opposant l’Union des associations européennes de football (UEFA) à la plateforme de revente de billets Viagogo que la question prioritaire de constitutionnalité a donné lieu à la décision du Conseil constitutionnel du 14 décembre 2018.

Décision de première instance : TJ Paris, 3e ch., 1re sect., 15 oct. 2020, n° 19/02858.

Jurisprudence européenne exigeante pour les hébergeurs : CJUE 3 oct. 2019, aff. C-18/18

Manifestations sportives : 

Cons. const. 14 déc. 2018, n° 2018-754 QPC

TJ Paris, 8 nov. 2022, n° 20/03744, FFT c/ Viagogo AG et Viagogo Entertainment ;

TJ Paris, 11 févr. 2021, n° 17/16818, FFT c/ Ticketbis ;

TGI Paris, 31 mai 2019, UEFA c/ Viagogo AG et Viagogo Entertainment.

 

en_GBEnglish