+33 (0) 7 5692 5302

Le licencié d’un logiciel est-il contrefacteur ou simplement co-contractant fautif ?

18 oct 2018 –

 

Le licencié peut-il être qualifié de contrefacteur ? Evolution du débat.

Le fait pour un licencié de logiciel de ne pas respecter les termes d’un contrat de licence de logiciel (par expiration d’une période d’essai, dépassement du nombre d’utilisateurs autorisés ou d’une autre unité de mesure, comme les processeurs pouvant être utilisés pour faire exécuter les instructions du logiciel, ou par modification du code-source du logiciel lorsque la licence réserve ce droit au titulaire initial) constitue-t-il :

– une contrefaçon (au sens de la directive 2004/48 du 29 avril 2004) subie par le titulaire du droit d’auteur du logiciel réservé par l’article 4 de la directive 2009/24/CE du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur
– ou bien peut-il obéir à un régime juridique distinct, comme le régime de la responsabilité contractuelle de droit commun ?

S’il s’agit d’une contrefaçon, le contrefacteur est pousuivable selon le régime spécifique de la contrefaçon, avec en particulier la possibilité de poursuites pénales, de saisie-contrefaçon ;

S’il s’agit d’un simple manquement contractuel, le licencié est poursuivable selon le régime général de la faute civile contractuelle.

La différence est considérable sur le plan juridique, notamment en ce qui concerne l’administration de la preuve et le type d’indemnisation que l’on peut obtenir en réparation.

 

Cour d’appel de Paris, pôle 5 – ch. 1, arrêt du 16 octobre 2018

1 Par un contrat du 25 août 2010, modifié par un avenant du 1er avril 2012, la société IT Development a consenti à la société Free Mobile, opérateur de téléphonie proposant des forfaits mobiles sur le marché français, une licence et un contrat de maintenance sur un progiciel dénommé ClickOnSite, logiciel de gestion de projet centralisé destiné à lui permettre d’organiser et de suivre en temps réel l’évolution du déploiement de l’ensemble de ses antennes de radiotéléphonie par ses équipes et par ses prestataires techniques extérieurs.

Arguant de modifications apportées au logiciel en violation du contrat de licence, et après avoir fait procéder le 22 mai 2015 à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société Coraso, sous-traitant de la société Free Mobile, la société IT Development a, par acte du 18 juin 2015, fait citer la société Free Mobile en contrefaçon du logiciel ClickOnSite et indemnisation de son préjudice.

Outre l’irrecevabilité et le mal fondé de ces demandes, la société Free Mobile s’est portée demanderesse reconventionnelle en procédure abusive.

2 La société IT Development a interjeté appel le 3 février 2017 du jugement contradictoire rendu le 6 janvier 2017 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

  • Déclaré la société IT Development irrecevable en ses prétentions fondées sur la responsabilité délictuelle,
  • Rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société
    Free Mobile,
  • Condamné la société IT Development aux dépens et à payer à la société Free Mobile la
    somme de 8000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de
    procédure civile.

3 Dans ses dernières conclusions du 3 mai 2018, la société IT Development demande à la cour de :

  • A titre préliminaire, soumettre à la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) une question préjudicielle sous la forme suivante :
    « Le fait pour un licencié de logiciel de ne pas respecter les termes d’un contrat de licence de logiciel (par expiration d’une période d’essai, dépassement du nombre d’utilisateurs autorisés ou d’une autre unité de mesure, comme les processeurs pouvant être utilisés pour faire exécuter les instructions du logiciel, ou par modification du code-source du logiciel lorsque la licence réserve ce droit au titulaire initial) constitue-t-il :
    – une contrefaçon (au sens de la directive 2004/48 du 29 avril 2004) subie par le titulaire du droit d’auteur du logiciel réservé par l’article 4 de la directive 2009/24/CE du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur
    – ou bien peut-il obéir à un régime juridique distinct, comme le régime de la responsabilité contractuelle de droit commun ? ».
  • Infirmer le jugement dont appel, et :
    » Déclarer recevable l’action en contrefaçon introduite par la société IT Development ;
    » Dire que le logiciel ClickOnSite argué de contrefaçon est identifié et original ;
    » Dire et juger que les modifications du logiciel par la société Free Mobile sont constitutives d’actes de contrefaçon ;
    » A titre principal, au titre de la contrefaçon, condamner la société Free Mobile à payer à la société IT Development la somme de 1.440.000 € pour réparation du préjudice subi par la société IT Development ;
    » A titre subsidiaire, sur le fondement contractuel, condamner la société Free Mobile à payer à la société IT Development la somme de 840.000 € pour réparation du préjudice subi par la société IT Development ;
  • Dans tous les cas : Interdire aux sociétés Free Mobile et Coraso d’utiliser le logiciel ClickOnSite et d’extraire et de réutiliser les données issues du logiciel ClickOnSite sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du lendemain du quinzième jour de la signification de la décision à intervenir, à charge pour Free Mobile de justifier de la cessation de l’utilisation du logiciel par tout moyen à sa convenance (désinstallation ou autre) ;
    » Se réserver la compétence de la liquidation des astreintes ;
    » Condamner la société Free Mobile aux entiers dépens y compris les frais de constats et les frais de saisies-contrefaçon ;
    » Condamner la société Free Mobile à payer à la société IT Development la somme de 40.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

4 Dans ses dernières conclusions du 11 mai 2018, la société Free Mobile demande à la cour de :

  • Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a débouté la société Free Mobile de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et sauf sur le quantum de la condamnation prononcée contre la société IT Development sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
  • Infirmant le jugement de ces chefs, et statuant à nouveau :
    » condamner la société IT Development à payer à la société Free Mobile la somme de 50.000 € (cinquante mille euros) à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
    » condamner la société IT Development à payer à la société Free Mobile la somme de 50.000 € (cinquante mille Euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens de première instance ;
  • Ajoutant au jugement :
    » Prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 22 mai 2015
    par Maître Yves MAS, huissier de justice, au siège social de la société CORASO ;
    » Prononcer la nullité du « Rapport d’expertise » du 30 mai 2015 et de la « Note technique librement établie » versés aux débats par la société IT Development comme pièces n°12 et n°43, ou à tout le moins les déclarer irrecevables comme preuves et les écarter des débats ;
    » Déclarer la société IT Development irrecevable, et en tout cas mal fondée, en l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la société Free Mobile ; l’en débouter ;
    » Condamner la société IT Development à payer à la société Free Mobile la somme de 50.000 € (cinquante mille Euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non compris dans les dépens de l’instance d’appel ;
    » Condamner la société IT Development aux entiers dépens, qui pourront être directement recouvrés par la SELAS Bardehle Pagenberg, Avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

5 L’ordonnance de clôture est du 15 mai 2018.

DISCUSSION

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur la recevabilité et la question préjudicielle

6 Dans son assignation et ses conclusions de première instance, la société IT Development soutenait que la société Free Mobile avait commis des actes de contrefaçon en modifiant le logiciel ClickOnSite, notamment en créant de nouveaux formulaires. Selon elle, la défenderesse n’était pas recevable à invoquer les dispositions de l’article L.122-6-1 du code de la propriété intellectuelle l’autorisant à modifier le logiciel pour une utilisation conforme à sa destination, dès lors, d’une part, que ces modifications auraient été substantielles, d’autre part, que la possibilité d’y procéder aurait été exclue par le contrat ;

7 Pour la déclarer irrecevable en ces prétentions fondées sur la contrefaçon, le tribunal a considéré que la combinaison des articles 122-6 et 122-6-1 du code de la propriété intellectuelle conduisait à reconnaître deux régimes distincts de responsabilité en la matière, l’un délictuel en cas d’atteinte aux droits d’exploitation de l’auteur du logiciel, tels que désignés par la loi, l’autre contractuel, en cas d’atteinte à un droit de l’auteur réservé par contrat ; qu’en l’espèce, il était clairement reproché à la société Free Mobile des manquements à ses obligations contractuelles, relevant d’une action en responsabilité contractuelle et non pas des faits délictuels de contrefaçon de logiciel ;

8 En cause d’appel, la société IT Development sollicite à titre préliminaire la soumission d’une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union Européenne, puis l’infirmation du jugement, demandant de déclarer recevable l’action en contrefaçon. À ces fins, elle soutient, en premier lieu, que le droit reconnu à l’auteur d’un logiciel d’autoriser ou interdire la modification du code source du logiciel est un droit d’origine légal, et que la violation de ce droit par le licencié n’est pas une simple inexécution contractuelle mais une violation du droit légal de l’auteur, constituant donc une contrefaçon ; en second lieu, que si pour tous les autres droits de propriété intellectuelle l’action en contrefaçon est expressément ouverte en cas de violation d’un contrat de licence, l’article L 335-3 alinéa 2 du CPI qui dispose qu’est également un délit de contrefaçon la violation de l’un des droits de l’auteur d’un logiciel définis à l’article L.122-6, a vocation à s’appliquer tant aux cas d’un usage sans droit (la « piraterie » au sens strict), qu’à ceux d’un usage excédant la licence ; en troisième lieu, que l’action en contrefaçon n’est pas une action de nature exclusivement délictuelle ; que la distinction entre responsabilité contractuelle et délictuelle est contraire à l’objectif du législateur européen d’établir une procédure unique à la suite de la directive 2004/48 ; qu’en réalité, la contrefaçon a une double nature : action délictuelle et contractuelle, et elle est aveugle, depuis la loi de 2007, à la distinction du contractuel et du délictuel ; qu’en quatrième lieu, la directive sur la lutte contre la contrefaçon a voulu donner à la contrefaçon une définition la plus large possible s’étendant à toute atteinte aux droits de propriété intellectuelle.

9 La société Free Mobile, qui estime qu’il n’est pas besoin de poser une quelconque question préjudicielle, demande la confirmation du jugement. Elle soutient que les dispositions légales aménagent deux régimes de responsabilité différents pour deux catégories d’actes différentes, d’une part, les actes portant atteinte à un droit réservé par la loi, ouvrant au bénéfice de l’auteur du logiciel une action en responsabilité délictuelle, l’action en contrefaçon, d’autre part, les actes portant atteinte à un droit réservé par contrat, ouvrant au bénéfice de l’auteur du logiciel une action en responsabilité contractuelle contre son cocontractant ; qu’en l’espèce, les actes incriminés, à savoir une violation des obligations contractuelles du licencié, n’ouvrent pas à la société Free Mobile une action en contrefaçon ; que le non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle est un principe cardinal de la responsabilité civile en droit français et qu’il est en effet constant que le créancier d’une obligation contractuelle ne peut se prévaloir contre le débiteur de cette obligation, quand bien-même il y aurait intérêt, des règles de la responsabilité délictuelle ; qu’en réalité, lorsque le législateur entend déroger au droit commun en permettant à la partie lésée d’agir en responsabilité délictuelle contre un licencié qui enfreint l’une des limites de sa licence alors qu’il ne pourrait le faire en principe que sur le fondement de la responsabilité contractuelle, il prévoit alors expressément et très précisément cette dérogation, ainsi en matière de licence de brevet ou en matière de licence de marque ; qu’en revanche, en matière de licence de logiciel, le législateur n’a prévu aucune dérogation au principe de droit commun selon lequel, en présence d’un contrat de licence liant les parties, le régime de la responsabilité contractuelle prévaut sur celui de la responsabilité délictuelle ; qu’aucune disposition de la Directive 2009/24/CE du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur, ni aucune disposition de la Directive 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, n’impose aux États membres de faire prévaloir la responsabilité délictuelle sur la responsabilité contractuelle dans le cas où l’utilisateur légitime d’un logiciel enfreint les limites de la licence dont il bénéficie ; que la Cour de Justice de l’Union Européenne a par ailleurs déjà elle-même consacré, dans un arrêt du 18 avril 2013 (C-103/11, Commission européenne c. Systran) rendu en matière de licence de logiciel, le principe de droit commun selon lequel la responsabilité contractuelle prévaut sur la responsabilité délictuelle.

Ceci étant exposé, la cour

10               1 – Le contexte factuel

La cour rappelle que par un contrat du 25 août 2010, modifié par un avenant du 1er avril
2012, la société IT Development a consenti à la société Free Mobile, opérateur de
téléphonie proposant des forfaits mobiles sur le marché français. une licence et un contrat
de maintenance sur un progiciel dénommé ClickOnSite, logiciel de gestion de projet
centralisé destiné à lui permettre d’organiser et de suivre en temps réel l’évolution du
déploiement de l’ensemble de ses antennes de radiotéléphonie par ses équipes et par ses
prestataires techniques extérieurs.

La société IT Development reproche à la société Free Mobile d’avoir modifié le logiciel ClickOnSite, notamment en créant de nouveaux formulaires.

Outre le caractère selon elle substantiel de ces modifications, elle fait notamment valoir les stipulations de l’article 6 “étendue de la licence” pour soutenir que la société Free Mobile n’avait pas le droit de procéder à de telles modifications :

En tout état de cause, le Client s’interdit expressément (…) de :
– reproduire, directement ou indirectement, le Progiciel (…) à l’exception des copies de sauvegarde ;
– décompiler et/ou effectuer des opérations de rétro ingénierie sur le Progiciel, sauf exceptions légales ;
– modifier, de corriger, d’adapter, de créer des œuvres secondes et d’adjonction, directement ou indirectement, relativement au Progiciel, étant entendu que le Client aura néanmoins librement accès en lecture à la base de données.
– (…)

En cas de besoin, le Client se réserve le droit de demander, par simple courrier, fac- similé ou mél, au Fournisseur des informations nécessaires à l’interopérabilité ou la compatibilité du Progiciel avec un autre logiciel utilisé par le Client. Faute de réponse satisfaisante quant à la complétude et à la pertinence de ces informations de la part du Fournisseur dans un délai d’un mois après réception de ladite demande, le Client procédera de lui-même, conformément aux dispositions de l’article L 122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle, aux opérations de décompilation du code-source du Progiciel aux seules fins d’assurer l’interopérabilité ou la compatibilité du Progiciel avec un autre logiciel utilisé par le Client (…).

En première instance, la demanderesse fondait ses demandes exclusivement sur la contrefaçon. En cause d’appel, elle les fonde aussi, à titre subsidiaire, sur la responsabilité contractuelle.

Outre l’irrecevabilité des demandes sur le fondement de la contrefaçon, la société Free Mobile soutient au fond, de première part, que la preuve de l’originalité du logiciel n’est pas rapportée, de deuxième part, que les opérations de saisie-contrefaçon sont nulles, de même que le rapport établi par un expert, de troisième part, que la preuve d’une modification non autorisée du logiciel n’est pas rapportée, de dernière part, que les modifications effectuées ne concernent que la base de données propre à l’opérateur licencié et que la clause d’interdiction de modifier le progiciel, contraire aux dispositions d’ordre public de l’article L.122-6-1 du code de la propriété intellectuelle, doit être réputée non écrite.

11               2 – Les textes pertinents

a – Les directives communautaires

Article 2 de la directive 48/2004/CE du 29 avril 2004

1 – Sans préjudice des moyens prévus ou pouvant être prévus dans la législation communautaire ou nationale, pour autant que ces moyens soient plus favorables aux titulaires de droits, les mesures, procédures et réparations s’appliquent, conformément à l’article 3, à toute atteinte aux droits de propriété intellectuelle prévue par la législation communautaire et/ou la législation nationale de l’État membre concerné.

Directive 2009/24/CE du 23 avril 2009

Article 4 – Actes soumis à restrictions

1. Sous réserve des articles 5 et 6, les droits exclusifs du titulaire au sens de l’article 2 comportent le droit de faire ou d’autoriser :
a) la reproduction permanente ou provisoire d’un programme d’ordinateur, en tout ou en partie, par quelque moyen et sous quelque forme que ce soit (…)
b) la traduction, l’adaptation, l’arrangement et toute autre transformation d’un programme
d’ordinateur et la reproduction du programme en résultant, sans préjudice des droits de la
personne qui transforme le programme d’ordinateur ;
c) toute forme de distribution, y compris la location, au public de l’original ou de copies
d’un programme d’ordinateur.

Article 5 – Exceptions aux actes soumis à restrictions

1. Sauf dispositions contractuelles spécifiques, ne sont pas soumis à l’autorisation du titulaire les actes visés à l’article 4, paragraphe 1, points a) et b), lorsque ces actes sont nécessaires pour permettre à l’acquéreur légitime d’utiliser le programme d’ordinateur d’une manière conforme à sa destination, y compris pour corriger des erreurs.

b – Les articles du code la propriété intellectuelle

Article L112-2

Sont considérés notamment comme oeuvres de l’esprit au sens du présent code : (…)
13° Les logiciels, y compris le matériel de conception préparatoire.

Article L122-6

Sous réserve des dispositions de l’article L. 122-6-1, le droit d’exploitation appartenant à l’auteur d’un logiciel comprend le droit d’effectuer et d’autoriser :

1° La reproduction permanente ou provisoire d’un logiciel (…)
2° La traduction, l’adaptation, l’arrangement ou toute autre modification d’un logiciel et
la reproduction du logiciel en résultant (…)
3° La mise sur le marché à titre onéreux ou gratuit, y compris la location, du ou des exemplaires d’un logiciel par tout procédé (…)

Article L122-6-1

I. Les actes prévus aux 1° et 2° de l’article L. 122-6 ne sont pas soumis à l’autorisation de l’auteur lorsqu’ils sont nécessaires pour permettre l’utilisation du logiciel, conformément à sa destination, par la personne ayant le droit de l’utiliser, y compris pour corriger des erreurs.

Toutefois, l’auteur est habilité à se réserver par contrat le droit de corriger les erreurs et de déterminer les modalités particulières auxquelles seront soumis les actes prévus aux 1° et 2° de l’article L. 122-6, nécessaires pour permettre l’utilisation du logiciel, conformément à sa destination, par la personne ayant le droit de l’utiliser.

Article L335-3

Est également un délit de contrefaçon la violation de l’un des droits de l’auteur d’un logiciel définis à l’article L. 122-6.

3 – Motifs

12 Depuis le XIXème siècle, le droit français de la responsabilité civile repose sur le principe cardinal du non cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, lequel implique :

– qu’une personne ne peut voir sa responsabilité contractuelle et sa responsabilité délictuelle engagées par une autre personne pour les mêmes faits,
– que la responsabilité délictuelle est écartée au profit de la responsabilité contractuelle dès lors que, d’une part, les parties sont liées par un contrat valable et que, d’autre part, le dommage subi par l’une des parties résulte de l’inexécution ou de la mauvaise exécution de l’une des obligations du contrat.

Par ailleurs, le droit français considère de manière traditionnelle que la contrefaçon, laquelle est à l’origine un délit pénal, ressort de la responsabilité délictuelle et non de l’inexécution d’un contrat.

13 Le tribunal en a déduit en l’espèce, alors que les parties sont liées par le contrat du 25 août 2010 et qu’il est allégué que le dommage résulte de l’inexécution des clauses de ce contrat et particulièrement de son article 6, que la responsabilité délictuelle doit être écartée au profit de la responsabilité contractuelle, et par voie de conséquence que l’action en contrefaçon, assimilée à l’action délictuelle, doit être déclarée irrecevable.

La société intimée, qui vient au soutien de cette analyse, cite à juste titre des décisions de juridictions françaises allant en ce sens, dont un arrêt de cette chambre du 10 mai 2016.

14 Pourtant, c’est non sans pertinence que la société appelante soutient que la contrefaçon ne serait pas par essence une action délictuelle mais pourrait aussi résulter de l’inexécution d’un contrat.

Il est vrai en effet que la contrefaçon se définit dans son acception la plus large comme une atteinte à un droit de propriété intellectuelle et, dans le cas particulier de l’article L.335-3, comme la violation de l’un des droits de l’auteur d’un logiciel [définis à l’article L.122-6].

Aucun de ces textes non plus qu’aucun autre texte français relatifs à la contrefaçon ne dispose expressément que celle-ci ne s’applique que lorsque les parties ne sont pas liées par un contrat.

Même s’ils peuvent être présentés comme autant d’exceptions au principe du non cumul, les textes ci-après sont aussi des exemples de ce que l’action en contrefaçon peut être exercée en matière de brevets et de marques à l’encontre du licencié qui enfreint les limites de son contrat :

Article L.613-8, alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle

Les droits conférés par la demande de brevet ou par le brevet peuvent être invoqués à l’encontre d’un licencié qui enfreint l’une des limites de sa licence.

Article L.714-1 du code de la propriété intellectuelle

Les droits conférés par la demande d’enregistrement de marque ou par la marque peuvent être invoqués à l’encontre d’un licencié qui enfreint l’une des limites de sa licence en ce qui concerne sa durée, la forme couverte par l’enregistrement sous laquelle la marque peut être utilisée, la nature des produits ou des services pour lesquels la licence est octroyée, le territoire sur lequel la marque peut être apposée ou la qualité des produits fabriqués ou des services fournis par le licencié.

Au cas d’espèce, les articles L 122-6 et L 122-6-1 du code de la propriété intellectuelle, s’ils prévoient notamment que les modalités particulières d’une modification d’un logiciel peuvent être déterminées par contrat, ne disposent nullement que dans ces cas une action en contrefaçon serait exclue. Il en est de même des articles 4 et 5 de la directive 2009/24/CE dont ils sont la transposition.

Enfin, il est vrai que l’article 2 “champ d’application” de la directive 48/2004/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle dispose d’une manière générale que les mesures, procédures et réparations s’appliquent (…) à toute atteinte aux droits de propriété intellectuelle, sans distinguer selon que cette atteinte résulte ou non de l’inexécution d’un contrat.

La cour estime dans ces conditions qu’une question préjudicielle doit être soumise dans les termes proposés à la Cour de Justice de l’Union Européenne.

Qu’il sera sursis à statuer jusqu’à ce que la cour de justice y ait répondu ;


DÉCISION

15 La cour, par arrêt contradictoire avant-dire droit,

Renvoie à la Cour de justice des Communautés européennes aux fins de répondre à la question préjudicielle suivante :

Le fait pour un licencié de logiciel de ne pas respecter les termes d’un contrat de licence de logiciel (par expiration d’une période d’essai, dépassement du nombre d’utilisateurs autorisés ou d’une autre unité de mesure, comme les processeurs pouvant être utilisés pour faire exécuter les instructions du logiciel, ou par modification du code-source du logiciel lorsque la licence réserve ce droit au titulaire initial) constitue-t-il :
– une contrefaçon (au sens de la directive 2004/48 du 29 avril 2004) subie par le titulaire du droit d’auteur du logiciel réservé par l’article 4 de la directive 2009/24/CE du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur
– ou bien peut-il obéir à un régime juridique distinct, comme le régime de la responsabilité contractuelle de droit commun ?

Sursoit à statuer sur l’appel de la société IT Development jusqu’à la décision de la Cour de justice,

Dit qu’une expédition de l’arrêt ainsi qu’une copie du dossier de l’affaire seront transmis à la Cour de justice des Communautés européennes sous pli recommandé.

L’originalité du logiciel devant le juge de la mise en état

Faites-vous accompagner pour vos contrats informatiques

 

 

Cour d’appel de Paris, Chambre 5, Pôle 2, 19 mars 2021, RG n°19/17493 confirmant TGI Paris 21 juin 2019 n°11/07081.

Dans cet arrêt, c’est le manquement contractuel qui est retenu à la suite d’un non respect des termes du contrat de licence de propriété intellectuelle (contrat de licence de logiciel).

Cette solution est néanmoins remise en cause par la Cour de cassation, qui admet l’action en contrefaçon.

Cour de cassation, 1ère ch. civile, arrêt du 5 octobre 2022

Question préjudicielle : le licencié d’un logiciel est-il contrefacteur ou simplement co-contractant fautif ?

La cession des droits d’auteur

Rappel du principe

Les règles de la propriété intellectuelle sanctionnent pénalement et civilement les atteintes contre le droit d’auteur, de marque ou de brevet, le droit d’auteur attaché au logiciel, c’est-à-dire le délit de contrefaçon.

 

Playdoyer pour une exception

Toutefois, quand un contrat est en jeu, impliquant une discussion et un partenariat entre deux co-contractants, une forme de confidentialité, il est surprenant d’invoquer les foudres attachées à la répression du délit (pénal et civil) de contrefaçon pour sanctionner le contractant indélicat.

La notion même de contrat paraît antinomique à la notion de délit, qui présuppose une atteinte portée à la confiance publique, un scandale public. On est tenté de dire ici que l’arrêt revient aux fondamentaux.

Il ne s’étend toutefois pas sur les raisons du choix du régime de la responsabilité contractuelle, indiquant simplement que :

 « lorsque le fait générateur d’une atteinte à un droit de propriété intellectuelle résulte d’un manquement contractuel, le titulaire du droit ayant consenti par contrat à son utilisation sous certaines réserves, alors seule une action en responsabilité contractuelle est recevable par application du principe de non-cumul des responsabilités. »

Le débat devant la Cour de justice de l’Union européenne

 L’arrêt rapporte surtout et aussi le débat qu’il y a eu devant la Cour de justice de l’Union Européenne sur le sujet (arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) rendu le 18 décembre 2019, aff. C-666-18)( arrêt du 18 décembre 2019, IT Development c. Free Mobile), sur le fondement des directives 2004/48 relative au respect des droits de propriété intellectuelle et 2009/24 sur la protection juridique des programmes d’ordinateur.

Selon la CJUE :

[…] si la directive 2004/48 vise à établir les mesures, procédures et réparations à l’égard des titulaires des droits de propriété intellectuelle, ce qui englobe les droits d’auteur des programmes d’ordinateur prévus par la directive 2009/24, cette première directive ne fixe pas les modalités exactes d’application de ces garanties et ne prescrit pas l’application d’un régime de responsabilité particulier en cas d’atteinte à ces droits.

44 – Il s’ensuit que le législateur national reste libre de fixer les modalités concrètes de protection des dits droits et de définir, notamment, la nature, contractuelle ou délictuelle, de l’action dont le titulaire de ceux-ci dispose, en cas de violation de ses droits de propriété intellectuelle, à l’encontre d’un licencié de programme d’ordinateur.

 

La doctrine reste cependant partagée sur le sujet, ainsi que la jurisprudence récente (TJ Paris 6 juillet 2021, n°18/01602), mais tend à l’admission de l’action en contrefaçon (cf. l’arrêt précité en début d’article Cour de cassation, (1re ch. civ), 5 octobre 2022, Sté Entr’ouvert et Sté Orange)

Les NFT et le droit d’auteur

L’originalité du logiciel devant le juge de la mise en état

 
 

 

Mise à jour 12 nov.2022

La Cour de cassation admet l’action en contrefaçon en cas de non respect du contrat de licence.

Dans l’arrêt Cour de cassation, (1re ch. civ), 5 octobre 2022, Sté Entr’ouvert et Sté Orange, la Cour de cassation reconnaît que l’atteinte aux droits de propriété intellectuelle peut être sanctionné par la contrefaçon indépendament du régime national de responsabilité, contractuel ou non.

Textes cités :

l’article L. 335-3, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle,

les articles 7 et 13 de la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au respect des droits de propriété intellectuelle

l’article 1er de la directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur.

 

Avocat spécialisé en droit informatique à Paris : faites vous accompagner pour vos contrats informatiques

  

Mise à jour 8 février 2023 : OVH cloud condamnée en première instance par le tribunal de commerce de Lille jugement du 26 janvier 2023

– Responsabilité contractuelle, Clause non écrite, Force majeure, Faute lourde, Obligation de moyens, Déséquilibre significatif, Contrat d’adhésion, articles 1170 et 1171, 1147 du code civil, « les données de sauvegarde avaient elles-aussi été détruites et perdues à cause de l’incendie car ces dernières étaient stockées au même endroit que le serveur principal » – Dans cette affaire, le tribunal écarte l’exonération et la limitation de responsabilité du prestataire de service cloud en retenant qu’autrement cela créerait un déséquilibre significatif et anihilerait l’obligation essentielle du prestataire :

« En l’espèce, réaliser les copies de sauvegarde et les mettre en sécurité, en particulier en cas de sinistre ou d’incendie, est une obligation essentielle du contrat. La clause 7.7 du contrat OVH prive donc de sa substance l’obligation essentielle de la SAS OVH et doit donc être réputée non écrite. »

[…]

« En l’espèce, la clause de limitation de responsabilité établie par la SAS OVH octroie un avantage injustifié à celle-ci en absence de contrepartie pour le client. Cette clause crée une véritable asymétrie entre les obligations de chacune des parties. En définitive, cette clause transfère le risque sur l’autre partie de manière injustifiée et sans contrepartie pour cette dernière. »

Faites-vous accompagner par un avocat spécialisé en droit informatique dans le cadre de vos contrats informatiques. Les litiges relevant du droit informatique peuvent être nombreux. Il peut s’agir de problèmes de contrefaçon de matériels informatiques, de problèmes de pertes de données, de résiliation contractuelle, etc. Un avocat spécialisé en droit informatique pourra vous accompagner.

L’informatique poursuit sa croissance dans notre société au fil des ans. Au cœur de la transformation digitale, il convient pour les professionnels, et notamment pour les entreprises d’assurer leur protection pour prévenir d’éventuels litiges informatiques.

Afin de se protéger, une entreprise peut mettre en place des contrats informatiques dans le cadre de la gestion de son parc informatique. Plusieurs types de services peuvent être définis dans un contrat informatique. Cela peut être des services d’installation, de développement, de maintenance ou d’assistance sur un système informatique.

Vous êtes confronté à un litige en matière de droit informatique ? Vous souhaitez-vous renseigner sur les contrats informatiques que vous pouvez mettre en place afin de vous protéger ? Pierre de Roquefeuil, avocat spécialisé en droit informatique à Paris vous accompagne pour vous conseiller et défendre vos intérêts.

 

Le contrat informatique et l’avocat spécialisé en droit informatique, à Paris

 

Un contrat informatique peut être établi dans le cadre d’une vente, d’une location ou d’une prestation de services, concernant un système informatique ou un élément intégré. Il peut s’agir de matériels (ordinateurs, équipements informatiques, périphériques…etc.) ou de logiciels (logiciel développé par un prestataire ou un logiciel standard).

 

Les contrats informatiques doivent être élaborés avec soin pour prévenir les éventuels changements techniques ou les évolutions d’usage. L’élaboration de contrats informatiques est donc technique et complexe, le contrat doit être rédigé avec vigilance.

 

Le contrat informatique doit mentionner plusieurs informations indispensables en lien notamment avec les problématiques de propriété intellectuelle ou encore de protection des données personnelles. Par ailleurs, plusieurs caractéristiques devront être définies dans le contrat. En effet, doivent apparaître: le calendrier de mise en œuvre ou encore le périmètre concerné par le contrat.

 

Un avocat spécialisé en droit informatique pourra vous aider à rédiger votre contrat en bonne et due forme.

 

 

Quels sont les différents contrats informatiques ? Un avocat spécialisé en droit informatique vous répond :

 

          Le contrat de maintenance et l’avocat en droit informatique

 

Autrement appelé SLA (Service Level Agreement), le contrat de maintenance permet au client de déterminer ses attentes relatives à la maintenance de son matériel informatique que le prestataire informatique doit avoir envers lui.

 

Ainsi, le contrat de maintenance a pour effet de définir les droits et les devoirs des deux parties : le client et le prestataire. Celui-ci doit mentionner le périmètre du matériel, les services que couvre le contrat, la durée du contrat, la qualité du service fourni…etc.

 

A l’élaboration du contrat, il convient néanmoins de distinguer la maintenance corrective de la maintenance préventive :

  • La maintenance corrective vise à réparer les erreurs de fonctionnement,
  • La maintenance préventive concerne les vérifications périodiques qui doivent être effectuées pour détecter des éventuels dysfonctionnements, dégradations ou obsolescences du matériel.

 

 

 

                Le contrat d’intégration de système

 

L’intégration de système se défini par l’assemblage des différents composants informatiques d’une entreprise qu’ils soient matériels : ordinateur, serveur, équipement de réseau, téléphones…etc. ; ou immatériels : logiciels, applications…etc.

 

Le contrat d’intégration de système doit couvrir différents aspects :

  • Les aspects matériels : fourniture et installation
  • Les aspects logiciels : ainsi que leur interfaçage
  • Le câblage
  • La formation
  • L’assistance au démarrage
  • La maintenance
  • Le déploiement

 

Un prestataire a une obligation de conseil et de mise en garde vis-à-vis de son client dans le cadre d’un contrat d’intégration de systèmes.

 

 

                   Le contrat de licence de logiciel et l’avocat en droit informatique

 

Un contrat de licence concerne seulement le logiciel. Il peut s’agir d’un contrat de licence de vente ou de location. Celui-ci défini précisément les droits donnés par l’auteur du logiciel à l’autre partie. Il détaille les droits d’utilisation, les droits de reproduction, les droits de modification ou les droits d’adaptation du logiciel en question.

 

Tout comme les contrats précités, le contrat de licence de logiciel doit mentionner l’identification des deux parties, son objet, la date d’entrée en vigueur et la date de fin, les dispositions générales et particulières.

 

                 Le contrat d’hébergement informatique

 

Le contrat d’hébergement informatique est l’un des plus répandus. Celui-ci consiste à délimiter une prestation informatique qui permet l’hébergement de nombreuses ressources sur un serveur. Aussi, il mentionne les conditions de gestion ou d’évolution du client dans le temps.

 

A cet effet, le contrat d’hébergement informatique est donc un engagement sur une capacité de stockage et une garantie de disponibilité des données. Le contrat doit contenir une clause de réversibilité permettant aux clients de récupérer la totalité de leurs données.

 

Enfin, l’hébergeur doit dans ce contrat, s’engager sur la confidentialité des informations qui seront hébergées. Il devra également préciser les modalités appliquées dans le cadre de la sécurité des ressources. Cela concerne notamment le piratage ou tout acte malveillant de menace informatique.

 

 

           Le contrat de vente ou de location de matériel informatique

 

Le contrat de vente ou de location de matériel informatique permet à une entreprise de louer du matériel informatique. Il peut être réalisé pour des ordinateurs ou des systèmes informatiques. Cela peut également être de la location de logiciels ou de progiciels.

 

Le contrat de vente ou de location de matériel informatique peut être de courte durée. Par exemple, pour le remplacement d’un appareil qui vient de tomber en panne. Il peut être conclu pour répondre à un besoin urgent ou même imprévu comme un surcroît d’activité.

 

Le contrat de location de matériel informatique est en général conclu pour une durée de 3 ans. Il doit comporter une clause d’évolution qui permet au client de faire renouveler le matériel informatique au bout de 15 à 30 mois. Cela afin de bénéficier de nouveautés sans augmentation de tarif.

 

Le prestataire doit de son côté effectuer les réparations et la maintenance du matériel qu’il loue. Aussi, il a une obligation de garantie. De ce fait, il garantit le bon fonctionnement du matériel. Il doit par conséquent intervenir en cas de mauvais fonctionnement de l’appareil loué à la suite d’un vice-caché ou d’une panne.

 

Enfin, de son côté, le client s’engage à utiliser le bien de façon raisonnable et à le restituer à l’issue du contrat de location au prestataire.

 

       Le contrat d’externalisation ou contrat d’outsourcing et l’avocat en droit informatique à Paris

 

Il vise à confier une fonction ou un service à un prestataire externe spécialisé. Le prestataire doit ainsi veiller à ce que la prestation soit réalisée en conformité avec les niveaux de service. La performance et les responsabilités spécifiées dans le cahier des charges doivent être respectées.

 

Avoir recours à un prestataire externe permet à l’entreprise demandeuse de se concentrer sur sa mission principale.

 

 

Obligations des parties dans un contrat informatique. Faire appel à un avocat à Paris spécialisé en droit informatique

 

Comme dans n’importe quel contrat, les parties s’engage l’une envers l’autre à respecter certaines obligations. Quelles sont-elles ?

 

                  Les obligations du prestataire

 

Le prestataire doit respecter un certain nombre d’obligations en contrepartie de sa rémunération :

  • Il s’engage à apporter toutes les informations des différents enjeux du contrat au client,
  • Il doit conseiller son client par rapport aux choix qu’il aura à faire dans le cadre du projet. L’expertise du prestataire permettra au client de bénéficier de toutes les informations utiles. Cela lui permettra ensuite de choisir les meilleures solutions pour son projet,
  • Le prestataire est tenu de tenir son client informé si un danger ou un risque intervient au cours de la prestation.

 

                 Les obligations du client

 

Ensuite, le client, de son côté, est également tenu de respecter certaines obligations dans le cadre d’un contrat informatique :

  • Le client s’engage à régler le prestataire du tarif convenu en amont du contrat,
  • Il doit pouvoir permettre au prestataire d’exécuter convenablement sa prestation,

 

 

  Durée du contrat informatique : est-il possible d’y mettre fin avant son terme ? Comment gérer la rupture du contrat ?

 

Dans le cas où le contrat détermine une durée, le contrat prend alors fin une fois la prestation terminée. Néanmoins, il reste possible d’interrompre le contrat avant la date de fin, à la condition que les deux parties en soient d’accord. La décision d’y mettre fin devra être actée par écrit. Par ailleurs, le contrat peut également être reconduit si le prestataire, comme le client en sont d’accord.

 

Si le contrat ne prévoit pas de date de fin, il est possible pour le prestataire et pour le client d’y mettre fin à tout moment. La décision doit être faite de façon écrite. Il conviendra toutefois de respecter un préavis défini par les usagers ou par certains accords professionnels. Les deux parties, l’une comme l’autre, peuvent exiger une indemnisation de réparation du préjudice subi en cas de rupture d’un contrat informatique de manière soudaine, violente ou imprévisible.

 

Cahier des charges, obligation de conseil, méthode agile, procès-verbal de recette, maintenance évolutive et corrective, mise sous séquestre du code source, expertise informatique, résiliation aux torts exclusifs, autant de notions à maîtriser pour envisager la mise en place d’un nouveau logiciel, d’un nouvel ERP, d’un nouveau système, ou envisager une rupture de contrat.

 

Vous souhaitez vous faire accompagner d’un avocat spécialisé en droit informatique afin d’obtenir des conseils pour l’élaboration d’un contrat informatique ? Vous rencontrez des litiges en lien avec le droit informatique ?

Pierre de Roquefeuil, avocat spécialisé en droit informatique à Paris, vous accompagne pour vous conseiller et pour faire respecter vos intérêts.

Voir aussi :

La méthode agile : https://roquefeuil.avocat.fr/contrat-informatique-et-methode-agile/

Ord. n° 2021-1658, 15 déc. 2021, relative à la dévolution des droits de propriété intellectuelle sur les actifs obtenus par des auteurs de logiciels ou inventeurs non-salariés ni agents publics accueillis par une personne morale réalisant de la recherche : JO 16 déc. 2021

 

Le problème de l’accès aux code source

L’entreprise peut avoir des difficultés avec l’éditeur de son logiciel, qui demande des sommes exhorbitantes pour réaliser la maintenance, et vouloir conserver le logiciel en le faisant maintenir par un tiers prestataire.

Pour pouvoir modifier le logiciel, le maintenir, il faut pouvoir modifier le code source donc disposer de ce code, c’est-à-dire la version écrite dans un langage de programmation, compréhensible par l’homme, à la différence du code objet binaire, exécutable et compréhensible seulement par la machine.

Or l’éditeur d’un logiciel livre généralement seulement la version exécutable, celle qui est compréhensible par l’ordinateur. Les éditeurs sont souvent très réticents à l’idée de remettre ce code source car ils craignent qu’on leur vole leur savoir-faire, leur investissement.

Il s’agira de mettre en place un contrat de séquestre pour trouver un équilibre entre les droits de l’utilisateur et ceux de l’éditeur de logiciel. Mais un tel contrat n’existe pas toujours. Et les contrats existants peuvent être laconiques ou insatisfaisants en ce qui concerne le volet « maintenance ».

Les articles de référence sont les articles L. 122-6 et L. 122-6-1 du code de la propriété intellectuelle.

Article L122-6

Version en vigueur depuis le 11 mai 1994, Modifié par Loi n°94-361 du 10 mai 1994 – art. 4 () JORF 11 mai 1994

Sous réserve des dispositions de l’article L. 122-6-1, le droit d’exploitation appartenant à l’auteur d’un logiciel comprend le droit d’effectuer et d’autoriser :

1° La reproduction permanente ou provisoire d’un logiciel en tout ou partie par tout moyen et sous toute forme. Dans la mesure où le chargement, l’affichage, l’exécution, la transmission ou le stockage de ce logiciel nécessitent une reproduction, ces actes ne sont possibles qu’avec l’autorisation de l’auteur ;

2° La traduction, l’adaptation, l’arrangement ou toute autre modification d’un logiciel et la reproduction du logiciel en résultant ;

3° La mise sur le marché à titre onéreux ou gratuit, y compris la location, du ou des exemplaires d’un logiciel par tout procédé. Toutefois, la première vente d’un exemplaire d’un logiciel dans le territoire d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen par l’auteur ou avec son consentement épuise le droit de mise sur le marché de cet exemplaire dans tous les Etats membres à l’exception du droit d’autoriser la location ultérieure d’un exemplaire.

Article L122-6-1

Version en vigueur depuis le 26 novembre 2021, Modifié par Ordonnance n°2021-1518 du 24 novembre 2021 – art. 2

I. Les actes prévus aux 1° et 2° de l’article L. 122-6 ne sont pas soumis à l’autorisation de l’auteur lorsqu’ils sont nécessaires pour permettre l’utilisation du logiciel, conformément à sa destination, par la personne ayant le droit de l’utiliser, y compris pour corriger des erreurs.

Toutefois, l’auteur est habilité à se réserver par contrat le droit de corriger les erreurs et de déterminer les modalités particulières auxquelles seront soumis les actes prévus aux 1° et 2° de l’article L. 122-6, nécessaires pour permettre l’utilisation du logiciel, conformément à sa destination, par la personne ayant le droit de l’utiliser.

II. La personne ayant le droit d’utiliser le logiciel peut faire une copie de sauvegarde lorsque celle-ci est nécessaire pour préserver l’utilisation du logiciel.

III. La personne ayant le droit d’utiliser le logiciel peut sans l’autorisation de l’auteur observer, étudier ou tester le fonctionnement ou la sécurité de ce logiciel afin de déterminer les idées et principes qui sont à la base de n’importe quel élément du logiciel lorsqu’elle effectue toute opération de chargement, d’affichage, d’exécution, de transmission ou de stockage du logiciel qu’elle est en droit d’effectuer.

IV. La reproduction du code du logiciel ou la traduction de la forme de ce code n’est pas soumise à l’autorisation de l’auteur lorsque la reproduction ou la traduction au sens du 1° ou du 2° de l’article L. 122-6 est indispensable pour obtenir les informations nécessaires à l’interopérabilité d’un logiciel créé de façon indépendante avec d’autres logiciels, sous réserve que soient réunies les conditions suivantes :

1° Ces actes sont accomplis par la personne ayant le droit d’utiliser un exemplaire du logiciel ou pour son compte par une personne habilitée à cette fin ;

2° Les informations nécessaires à l’interopérabilité n’ont pas déjà été rendues facilement et rapidement accessibles aux personnes mentionnées au 1° ci-dessus ;

3° Et ces actes sont limités aux parties du logiciel d’origine nécessaires à cette interopérabilité.

Les informations ainsi obtenues ne peuvent être :

1° Ni utilisées à des fins autres que la réalisation de l’interopérabilité du logiciel créé de façon indépendante ;

2° Ni communiquées à des tiers sauf si cela est nécessaire à l’interopérabilité du logiciel créé de façon indépendante ;

3° Ni utilisées pour la mise au point, la production ou la commercialisation d’un logiciel dont l’expression est substantiellement similaire ou pour tout autre acte portant atteinte au droit d’auteur.

V.-Les actes mentionnés au 1° de l’article L. 122-6 ne sont pas soumis à l’autorisation de l’auteur lorsqu’ils sont effectués aux fins et dans les conditions mentionnées au 8° de l’article L. 122-5.

VI.-Les actes mentionnés aux 1° et 2° de l’article L. 122-6 ne sont pas soumis à l’autorisation de l’auteur lorsqu’ils sont effectués aux fins et dans les conditions mentionnées au III de l’article L. 122-5-3.

VII.-Les actes mentionnés à l’article L. 122-6 ne sont pas soumis à l’autorisation de l’auteur lorsqu’ils sont effectués aux fins et dans les conditions mentionnées aux 12° et 13° de l’article L. 122-5.

VIII. Le présent article ne saurait être interprété comme permettant de porter atteinte à l’exploitation normale du logiciel ou de causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l’auteur.

Toute stipulation contraire aux dispositions prévues aux II, III et IV du présent article est nulle et non avenue.

Le prestataire peut donc être contraint de remettre le code source, sous astreinte, par le juge, qui vérifiera si la maintenance devait être effectuée ou non par l’éditeur, selon les termes du contrat, et si la remise du code source et de sa documentation technique est indispensable pour la réalisation de la maintenance.

La nouvelle procédure d’injonction de payer – l’avis de l’avocat en droit commercial

Page spéciale contrats informatiques

Se faire accompagner en cybersécurité

L’originalité du logiciel devant le juge de la mise en état

 
 

CA Versailles, 1re ch. 1re sect., 25 mai 2021, n° 20/03501.

Dans une affaire de contrefaçon de logiciel, l’arrêt confirme l’ordonnance du juge de la mise en état devant lequel était contestée la validité de l’assignation pour insuffisance de précision.

 

Intérêt de l’arrêt

Il est intéressant dans le cadre de la réforme de la procédure civile attribuant de nouveaux pouvoirs au juge de la mise en état (article 789 du code de procédure civile)  car il vient rappeler le type de question pouvant être débattu devant lui, en matière de droit informatique.

 

Les faits

En l’espèce, le juge souligne les contours du droit d’auteur du logiciel, qui ne concerne pas l’interface graphique, ou la fonctionnalité mise en oeuvre (directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur et directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information).

« seul le code source permettait de connaître les choix précis du programmateur qui ont présidé à la mise en forme qui constitue le siège de l’originalité d’un logiciel. »

 

 

Le juge indique qu’il n’a pas à statuer sur l’originalité du logiciel ou à apprécier la suffisance de l’explicitation de l’objet de la demande, mais sanctionne le défaut d’explicitation de l’objet de la demande.

« Faute d’expliciter les caractéristiques originales revendiquées, de commenter le code source qui est le siège de ses droits, de produire aucun organigramme, il en déduisait que l’assignation ne répondait pas aux exigences de l’article 56, 2°, du code de procédure civile et devait être annulée puisqu’en outre cette carence causait un grief à la société Sélectour Entreprise qui se trouvait privée de développer une réponse utile donc de se défendre efficacement. »

C’est en effet au plaignant qu’il revient d’indiquer la caractéristique originale de l’oeuvre, celle qui mérite l’action en contrefaçon (CA Paris, Pôle 5 – ch. 1, 7 mai 2019, n° 16/11002, CA Douai, ch. 1 sect. 2, 5 avr. 2018, n° 16/04545).

 

Mise à jour 9 mai 2022

« il ne résulte d’aucun texte que l’originalité des œuvres éligibles à la protection au titre du droit d’auteur est une condition de recevabilité de l’action en contrefaçon. Si la démonstration d’une telle originalité est bien exigée, elle est une condition du bien-fondé de l’action et constitue un moyen de défense au fond »
Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère ch. – cab. 1, ordonnance d’incident du 3 mai 2022
Sucré Salé / Gaillet & Azur Technologie groupe

Voir aussi :

Le manquement à une licence de logiciel n’est pas une contrefaçon

Question préjudicielle : le licencié d’un logiciel est-il contrefacteur ou simplement co-contractant fautif ?

 
 
 
Ord. n° 2021-1658, 15 déc. 2021 relative à la dévolution des droits de propriété intellectuelle sur les actifs obtenus par des auteurs de logiciels ou inventeurs non-salariés ni agents publics accueillis par une personne morale réalisant de la recherche
 
 

Reprise des caractéristiques essentielles du jeu vidéo Super Sniper par le jeu Pocket Sniper : des actes de concurrence déloyale

Cour d’appel de Paris (pôle 5 – 11e ch.), 7 avril 2023, n° 21/05015, Sté Voodoo c/ Sté JP Group Ltd et a.

Contrat informatique et méthode agile

Mise à jour du 24 mars 2023 cliquer ici

Méthode agile dans les contrats informatiques, qu’est-ce que c’est ?

La méthode agile, décrite dans le « Manifeste agile » c’est l’informatique façon pétillante, ou danseuse, où l’on ne s’embarrasse pas  trop de plans, de documentations, de tests, de négociations, on développe en live et on voit si çà marche. C’est l’informatique en action, sur le terrain, comme au rugby (méthode « scrum » ou « mêlée »), exigeant des « sprints » et utilisant une gestion de projet dynamique, adaptée au « sprints ». Ainsi les logiciels de gestion de projet ont aujourd’hui leur déclinaison « sprint ».

La mesure de l’effort déployé : mesure par points et non par jour/homme ou par résultat atteint, basée sur une estimation par le prestataire de la durée et de la complexité requises pour développer la fonctionnalité, sans garantie d’un résultat d’ensemble prédéterminé à un moment donné.

C’est l’instantanéité qui est recherchée, l’adaptation à l’évolution du besoin, la coopération maximum client/prestataire. Ainsi le contrat informatique de commande de prestation « agile », le « Contrat agile » doit-il refléter ces spécificités.

L’équipe prestataire agit très près du commanditaire, ce qui vient distordre les appréciations usuelles en matière de responsabilité et de facturation. Le prestataire ne bénéficie d’aucune garantie de chiffre d’affaires ou de pérennité de relation.
 

Jurisprudence :

T.com.Paris, 9 mars 2015, Marty

T.comm. Nanterre, 24 juin 2016, MACIF
T.com., Paris, 7 octobre 2020, Oopet

Aix-en-Provence 2 mars 2017, 13/22835, Drilnet
Pau 19 nov.2018, 17/030030, D-E
Paris 17 nov.2017, 15/20024, Credentiel
Paris 3 juill.2015, 13/06963, SET

Paris 1er oct.2015, 14/07440, Isiasoft

Cass.com. 10 jan.2018, 16-23790

Méthode agile dans les contrats informatiques : Le client doit exprimer ses besoins et ne pas les modifier sans arrêt.

en_GBEnglish