Mis à jour le 7 novembre 2022
Une personne a été arrêtée pour possession de stupéfiants. Pendant sa garde à vue, elle a refusé de donner aux enquêteurs les codes permettant de déverrouiller deux téléphones susceptibles d’avoir été utilisés dans le cadre d’un trafic de stupéfiants.
Cette personne, poursuivie devant une juridiction correctionnelle, n’a pas été condamnée pour avoir refusé de donner ses codes de déverrouillage de téléphones ; elle a été relaxée.
Les mots de passe et les conventions de chiffrement permettent la protection des données, et leur divulgation imposée par les autorités peut mettre en danger la liberté individuelle et la démocratie mais aussi permettre la répression du crime.
Le Conseil Constitutionnel, sur QPC où intervient la Quadrature du Net, juge que l’incrimination de refus de communication de mot de passe n’est pas contraire à la Constitution.
L’article 434-15-2 du code pénal, dans sa rédaction résultant de la loi du 3 juin 2016 prévoit :
« Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 270 000 € d’amende le fait, pour quiconque ayant connaissance de la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie susceptible d’avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit, de refuser de remettre ladite convention aux autorités judiciaires ou de la mettre en œuvre, sur les réquisitions de ces autorités délivrées en application des titres II et III du livre Ier du code de procédure pénale.
« Si le refus est opposé alors que la remise ou la mise en œuvre de la convention aurait permis d’éviter la commission d’un crime ou d’un délit ou d’en limiter les effets, la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et à 450 000 € d’amende ».
On entend par moyen de cryptologie tout matériel ou logiciel conçu ou modifié pour transformer des données, à l’aide de conventions secrètes ou pour réaliser l’opération inverse avec ou sans convention secrète. Ces moyens de cryptologie visent principalement à garantir la sécurité du stockage ou de la transmission de données, en permettant d’assurer leur confidentialité, leur authentification ou le contrôle de leur intégrité.
Dans son arrêt du 7 novembre 2022, la Cour de cassation, assemblée plénière, pourvoi n° K 2183.146, indique, dans son communiqué de presse :
Un « moyen de cryptologie » a pour but de rendre des informations incompréhensibles, afin de sécuriser leur stockage ou leur transmission. Une « convention secrète de déchiffrement » permet la mise au clair des informations cryptées. Lorsqu’un téléphone portable est équipé d’un « moyen de cryptologie », le code de déverrouillage de son écran d’accueil peut constituer une « clé de déchiffrement » si l’activation de ce code a pour effet de mettre au clair les données cryptées que l’appareil contient ou auxquelles il donne accès. Dès lors, si un téléphone portable doté de ces caractéristiques techniques – comme c’est le cas aujourd’hui de la plupart des téléphones portables – est susceptible d’avoir été utilisé pour la préparation ou la commission d’un crime ou d’un délit, son détenteur, qui aura été informé des conséquences pénales d’un refus, est tenu de donner aux enquêteurs le code de déverrouillage de l’écran d’accueil. S’il refuse de communiquer ce code, il commet l’infraction de « refus de remettre une convention secrète de déchiffrement ». Par conséquent, en l’espèce, la décision de la cour d’appel est cassée et une autre cour d’appel est désignée pour rejuger l’affaire.